E... et moi éveillés autour de quatre heures, migraine récurrente de ma chère femme, sa main prenant un instant la mienne, et moi ensuite posant parfois les doigts au nu de son flanc. Degré zéro de la sexualité et de l’érotisme. Montage au théâtre du livre de Fernandez, ingéniosité des homosexuels pour se proclamer et tenter la propagation, Le Caravage dont on sait peu, sinon la vie courte, ravagée par son goût de la beauté mais tout autant par ses analyses contestataires de la société : jolis garçons, mendiants et prostitués sont ses principaux acteurs et modèles. Inquisition, procès, prisons, tableaux refuisés : procès-verbaux comme seul matériau biographique à l'appui de ce qui peut se déduire de l'oeuvre plastique...
La jeune commentatrice assimile sexualité à subversion. Les faits divers à la prédation, au viol et au meurtre. Je l’ai toujours vêcue – étant d’ailleurs passé sans transition de l’ignorance totale et de l’absence de toute conscience de quelque désir de sexe ou de nudité que ce soit, à l’expérience de l’inconnu (qui par le suspense de l’accomplissement se renouvelle à chaque étreinte) et de la communion, donc de la liturgie, d’une contemplation possible seulement à deux. Je ne suis pas sûr que le plus que deux soit un de mes fantasmes et l’homosexualité me parut aussitôt une chaîne, aussi dangereuse et liberticide qu’un enfant non attendu. Encore ce dernier appelle beaucoup de questions, et quand il me les posa, je ne sus que fuir et me mentir. – Ne parler et écrire que d’expérience (l’intuition en étant une) : Fernandez est cité dans le montage théatral au Lucernaire : oublié comme un chien. C’est n’avoir jamais « eu » un chien, n’avoir jamais vêcu avec un chien (les autres animaux, je ne sais pas, je suppose), qu’écrire cela : le chien est inoubliable, l’écart de longévité entre le chien et l’homme donne à ce dernier l’expérience de la séparation et la mort de chaque chien est souvent une culpabilité encore plus que le simple chagrin et regret d’une présence devenue tout autre.