dimanche 22 mai 2011

regarder, suivre Pierre Tal Coat 1905 + 1985 . une exposition de quelques oeuvres au chateau de Kerguehennec

Pierre Tal Coat
1905 + 1985
selon une exposition au château de Kerguehennec



en italiques, couleur bleu – dires du comentateur dans le film ou du peintre

Après-midi du dimanche 22 Mai 2011


. . . à Kerguehennec, 16 heures 05 + Pierre TAL COAT. Il me semble à premier regard, quatre cinq salles, des très petits formats, de l’aquarelle, deux grandes, avec un relief sans support, une autre tamisée, que cet artiste pose la question de la peinture. La question-même de la peinture. – Il répond ? « Pour moi l’essentiel, c’est le fond. Pas la préparation des fonds, mais cet humus. C’est le soubassement… La possible naissance de tout déjà. Ce n’est pas l’inertie en dessous. C’est un lieu inhabité encore des choses, qui n’est pas obectivité, mais qui a sa vie propre. » (Pierre TAL COAT, entretien avec Jean-Pascal LEGER – Dormont, 1977).

Une toile, dite Silex perdu . 1959. Pas même étonnant : j’ai rêvé cette toile ou à peu près, il y a deux nuits ? Ce ne peut être décrit. Fond beige très clair, comme le jeté d’une fourrure tachetée de noir avec parfois une touche carmin, fourrure d’ocelet ? la « fourrure » plus épaisse en contre-bas vers la droite du tableau, l’ensemble peut aussi bien être regardé tombant en s’épaississant, que montant en gagnant de volume, de surface mais en perdant ses tâches, pas même progressivement, mais nettement

Film d’un Pierre CHAPUIS : Pierre TAL COAT sur la terre où nous vivons. Né à Décembre 1905, école du Louvre en 1935, parents bretons. Chemin de chercheur. Mine ou carrière, matériau blanc, du talc, il est très grand, il marche avec un cahier immense de croquis, il dessine beaucoup dehors. 68 ans, au moment où il est filmé. Chercher, que veut-il saisir ? comment le comprendre : explication sur sa feuiille, mais comment la lire ? Est-ce une notation ? est-ce du travail ? Un homme qui refuse le plus facile, est toujours difficile à suivre. Traits tracés par une rage mêlées de tendresse mais poussée par quelle volonté ? Il est en short, les toiles très nombreuses, posés, verticales, appuyées les unes sur les autres en quinconces. Les mains presque charnues pour un corps dégingandé, maigre. Il travaille (commePICASSO) torse nu. On voit bien la pâte est belle, que la couleur… il peint large. Nous sommes dans la matière et comme tout à l’heure dans la campagne, nous sommes déconcertés. Nous attendons une image. Est-il bien sûr que… Il faut demeurer, ne pas partir, pour comprendre. Le visage est féminin. Il a changé par rapport à ses trente ans, figuratifs, cheveux noirs et gras, visage très plein. Un trio, figé. Il a maintenant un regard plissé, filtré. Cetrio est un autoportrait mais en femme, les regards sans pupîlle sont perçants.

1937, la guerre d’Espagne, les peintres ne sont jamais hors de ce qu’il se passe dans le monde. Visages déformés ? non, pas plaqués. Cela vient du fond, mais maladroitement. La variété des genres nous bouscule. Quand le peintre fait un autoportrait, c’est qu’ils ont un problème, poursuivre, ne pas hésiter, tout entreprendre. L’art n’est pas un seul métier. On voit des peintres sculpter, écrire. – Je suis saisi par l’envie de peindre, démarrer par un auto-portrait ? Une sculpture petite de taureau : on dirait une carène. Les têtes de bronze sont fantastiques. Ici, un oiseau qui s’interroge. Je ne sais où est la nuit ni où est le jour. Portrait de femme, contemporain de tout ce qui a précédé. La pré-figuration de ce que seront les terres hersées, re-labourées, fre-hersés. Petites touches. Toile, un homme en chemise, gilet paysan, on croirait Georges POMPIDOU… en 1935.

Les premiers dessins le font connaître aux marchands. Le cheveu est gris, dru, il est extrêmement grand. Cela manque de gris, cela ne s’ouvre pas, cela donnerait sans doute un peu plus de satisfaction. Les nus, cela donne de la connaissance et du désespoir. TAL COAT allant plus loin. Le midi de la France. Un profil assez aigu, peu de front.

Nous avons progreesé, toiles plus récentes, changé de marchands, les connaisseurs achètent, les intellectuels écrivent sur lui, les poètes l’environnent. Où est le progrès ? je ne crois pas que ce soit une volonté délibérée, c’est comme çà. Entre le vrai passé et le vrai présent de l’œuvre. Les taches cherchent à rejoindre les lignes, les traits deviennent des traces, nous filmons des œuvres extrêmement mouvantes. Pas de jeux. – Une espèce de jonction entre la lumière et la pierre. J’aime la lumière comme çà. – C’est en allant vers cette nature que le peintre va peut-être chercher l’essentiel, de cette beauté qui nous écrase. – Jeux des mains sur ciel à luminosité intense, elles sont plus fines que féminines, mi-aiguilles, mi-ailes ou plumes, assorties à l’air plus qu’au gesrte d’installer les feuilles du grand cahier de croquis. – L’ombre qui bouge comme une figure de femme. On est dans un cimetière monastique, croix de fer ajouré.

Pas un trait plat, un trait qui serait commun. Il est refusé, puis il… j’aimerais aller derrière … à la petite… derrière… Tous les matins, je longeais ce sentier, je passais, j’aboutissais là, je passais la petite mer, je montais l’opidum et je repartais, ou j’allais là où il y a les… ou sur l’oppidum, je redescendais, j’allais… ou bien je revenais par la route de Vauvenargues. – Il marche, il court , il vise comme un chasseur. Il faut que je traverse le papier. La raison pour laquelle vous crourez ? La vision est tout à fait différente. Si vous restez immobile, le paysage reste immobile, vous ne voyez rien, en courant je pouvais saisir la chose la plus intime qui traine par terre.

Toujours la même histoire d’une sensibilité, d’une matière. Il retourne chez lui en Normandie, il écrit, ne veut rien faire. – Cette singularité de « faire de l’abstrait » à travers champ ou en courant parmi… travailler, il faut travailler, la peinture. Portrait de la femme au bol. La femme, le bol doivent disparaître, seulement alors l’univers apparaît.

Si on se souvient du figuratif, il y a la peinture qui a mangé tout cela. – Oui, volonté de quitter une démarche intellectuelle, la chose sentie et une nouvelle. – Est-ce que vous voulez – Non, pas comme çà. Des matériaux posés. Le noir ne surgit pas, c’est une approche. Ces noirs sont un appel pour d‘autres noirs. – C’est plus profond, interroger encore TAL COAT avec Pierre DESCARS. Combien de temps entre ces deux toiles . ? Des siècles. Vingt ans, oh oui. Qu’est-ce qui se passe dici de différent ? – Vous le voyez, c’est une approche de la réalité. C’était encore dans le signe. Je voyais déjà comme cela, j’ai presque toujours vu comme çà, mais je n’arrivais pas à l’exprimer… C’est comme une plage, des points brillants qui restent, tirer parti du sec et du brillant. J’ai une profonde mémoire de la chose vue, de la chose sentie, je l’enfouis et en un temps que je peux ni déterminer ni provoquer, cela vient. Le fait de broyer les couleurs. Technique de TAL COAT est la même que celle de REMBRANDT ou COURBET. La solution n’est-elle pas dans la technique ? – Vous êtes dans la peinture. L’acrylique, c’est de la c… c’est plat, çà ne voyage pas. Différence entre le broyé et ce qui sort du tube, ce n’est pas en expansion..Chaque trace reste avec le pinceau, on peut l’ensevelir et le faire revenir. Le noir est une couleur à toujours effacer. Le fait de nommer, fixe. On dit un rouge, c’est… Vert, c’est très vague. L’œil ne voit pas comme çà, mais il est agrandi par ces points qui paraissent et disparaissent. Une valeur plus claire, c’est de la finition, la nuit précède le jour, la clarté vient après coup, c’était la marque des gens du XVIIème siècle, ils posaient la lumière à la fin. Si la lumière passe à travers le tableau, comme à travers un arbre, ils ne sont pas morcelés.

Ma femme le connaissait déjà, et bien. Il est mort en 1985.

Revenu vers ces croquis : mine de plomb, rarement titrés. Celui-ci, cependant labour, c’est plus aérien qu’un oiseau en plein vol dont seul est net à la vue, la tête et le bec. Ou cet autre, sans titre, silhouette de marabout, foule en marche ou en attente.

Trois auto-portraits… je n’étais pas entré dans cette salle, j’y reviens exprès, ma femme m’ayant dit que s’il y a au total bien peu d’œuvres, il y a quelques figuratifs. Je ne m’attendais pas à ce figuratif-là, au possible. Trois petits formats. Deux à la mine. Un proche à lunettes, encore composé de visage et de regard, l’autre presque surpris, alors que c’est un auto-portrait. Il donne les épaules, rien qu’une, mais suggère la silhouette, plus qu’une attitude. Un troisième est en couleurs, chapeau, crayonnement noir en fond, le chaoeau abrite, intrigue, débroussaille, déblaye, le regard enfin est là, on y va, il est vide. J’approche, ce sont des mines de couleur, ou des crayons, le regard est asymétrique, simplement deux yeux. – Une visiteuse me fait remarquer une toile, assez grande, couleur qui ne peut être dite, qui passe et se précise. Sortant du rocher I 1972. Une silhouette disparaissant ou apparaissant, peu importe. Latente. Piste abandonnée par le peintre ou trop dangereuse ? momie, fantôme, passant, quelqu’un ? quelqu’un ! ni imaginable ni descriptible. Quelqu’un, donc. La brosse part de lui, c’est lui qui a inspiré tout le tableau à partir de cette forme qui n’était peut-être pas quelqu’un d’abord, qui est venu… en peignant. En entreprenant de peindre.