La douceur était au coin de la rue
La douceur était au coin de la rue,
la douceur je l’ai invitée à ma table,
la douceur, elle m’a souri, elle m’a suivi,
la douceur avait les jambes si longues
et le visage si étonné de mes soins et de
la tendresse qu’elle croyait impossible aux hommes,
que je lui ai parlé,
que je suis revenu à elle tant de fois,
la douceur avait le front triste
et les mains travaillées,
la douceur était immense quand elle prenait
la vie, debout, à mes côtés,
la douceur vivait le jour au grand air
et la nuit en pension,
la douceur me parla de ceux qu’elle aime,
des existences des autres,
la douceur avait des seins blancs
et le corps noir,
le profil animal et fier,
le front bombé et attentif,
la douceur n’avait pas d’autre nom
que celui-là.
Aussi dans cette ville qui ne sera plus qu’un rivage
dans d’autres siècles ainsi qu’elle fut autrefois,
je te vis intelligence et distinction
que je ne savais pas encore nommer
douceur,
et nous ne nous payâmes que de la promesse
enfantine du revoir et que la caresse
du départ.
Aux moulures d’un débarcadère, tandis que le Christ
au Corcovado perdait son soleil,
nous fûmes au dernier
presque un couple. Il est – ici – encore beau.
Rio de Janeiro, 18 Février 1985
Brasilia, 28 Avril 1985
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