Discours du président de la République
annonçant sa démission
Françaises et
Français, mes chers compatriotes, mes concitoyens, mes amis,
il me semble
rajeunir de plus de deux ans en venir vous dire ce soir que ces dernières
semaines m’ont effectivement ramené à une campagne électorale qui fut heureuse
et que vous avez bénie de vos votes. Puis, ensuite, vous le savez bien, et
maintenant je le sais bien – est-ce trop tard – vous avez été déçu. Il vous a
semblé que je continuais, peut-être en moins tonitruant parce que j’ai sans
doute moins de culot et que j’ai quand même mémoire de ce que j’ai dit la
veille, mais que je continuais la politique de mon prédécesseur : des impôts,
toujours des impôts tout en diminuant donc votre pouvoir d’achat et même en
réduisant ce qu’on appelle la dépense publique et qu’il faut appeler plus
justement : les moyens du service public. Toujours payer une dette
publique, dite souveraine, en fait dette envers des esclavagistes : les
spéculateurs qui ont réussi à travestir et confisquer le métier des banques,
celles-ci vivant des frais prélevés sur vous et de leur spéculation grâce à la
masse de vos dépôts au lieu de financer les investissements et les entreprises,
les nôtres. Mon gouvernement les a nationalisées. Je continuais de reculer
devant les abus des dirigeants de nos grands sites industriels, délocalisant,
licenciant, irresponsables sur leur personne et sur leur avoir, pas toujours
visionnaires, comptables pour les salaires et pas pour leurs avantages propres.
Ce n’était pas la tradition française : nous avons eu de grands patrons
inventeurs, investisseurs, solidaires de leurs salariés. Les aînés d’entre nous
savent leur nom. Nous avons renoué en nationalisant chacune des entreprises que
les erreurs de leurs dirigeants mettaient en faillite sans connaissance du
marché autre que la manière de capter les carnets de commande en faisant ce que
l’on appelle de la croissance externe, chacune des entreprises, chacun des
grands groupes à qui l’Etat avait prêté, donné et pour lesquels l’Etat avait
adopté des législations et des réglementations sur mesure, sans pour autant que
soient maintenus les emplois, conquis des marchés. C’est fini. Les
nationalisations des banques et de ces entreprises dureront autant que la crise. Une crise de la
mentalité économique et financière que nous voulons transformer en une prise de
conscience que les valeurs et les directions de banque et d’entreprise sont
mieux défendus par la mise au pouvoir de leurs salariés de longue date, de
toute une vie souvent, que par des cooptés, des parachutés qui n’ont aucune
affection personnelle pour ces outils du bien commun, pour ces éléments du
patrimoine national, pour notre économie française.
J’ai demandé à
nos partenaires européens d’adopter le principe de l’élection du président de l’Union
par nous tous, sans souci des frontières et des systèmes juridiques e chacun :
une élection directe donnant de la voix et de la crédibilité à notre chère
vieille Europe toute couturée de ces guerres civiles qu’ont été les guerres
mondiales commençant toutes entre nous. La France a proposé aux grands Etats
débiteurs des marchés, qu’ils soient européens, outre-Atlantique ou à l’autre
bout du monde, que nous considérions pour ce qu’elle est, la coalition des
spéculations voulant notre perte en tant que tels, et pariant sur elle. Sans
doute, les Etats ont-ils eu tort de céder à un faux raisonnement, qui n’est pas
libéral, ni qui n’est pas libérateur ni des hommes ni de leurs échanges et qui
leur a fait adopter depuis vingt ans cette « déréglementation »
dépossédant la démocratie de chacun de ses leviers, de chacune de ses défenses.
Le mondialisme, stade suprême du capitalisme. Le dépérissement de l’Etat,
résultat non d’une révolution ou d’une sincérité communistes, mais de son
abolition par les ennemis du genre humain, par Mammon et les dieux de l’argent,
de l’accaparement. Nous sommes en voie, c’est techniquement compliqué et c’est
très nouveau en temps de paix – mais y sommes-nous quand l’assaut est donné à
ce qui devrait n’appartenir qu’à la démocratie et n’être influencé que par le
peuple : l’Etat. L’Etat n’est, en premier, ni la police ni le fisc, il est
l’outil du bien commun, le nôtre. L’organisateur de la solidarité et de notre
défense entre nous et vis-à-vis de l’extérieur. Le moratoire des dettes
souveraines a comme première étape ces nationalisations du système financier et
bancaire. L’ultime sera le retour à l’initiative et à l’actionnariat privé quand
les marchés ne seront plus les financiers de nos dettes publiques, et souvent
aventureuses. C’est pourquoi mon gouvernement a lancé cet emprunt citoyen, que
nous avons appelé, celui de la reprise de nous-mêmes, l’emprunt du destin
national. Puisqu’il a également du succès hors de nos frontières, certains
Etats-membres de notre Union ont commencé d’en faire autant. Il est probable que
des emprunts européens, de même nature, s’adressant de la même manière aux
personnes physiques, à chacun de vous libre ou pas de participer en grand ou
pour le symbole, au financement de nos grands investissements, de notre
défense, de notre solidarité nationale : ce ne sont pas des déficits
budgétaires, encore moins des éléments de dépendance française vis-à-vis d’on ne
savait plus trop qui ni de quoi, ce sont des manifestations de confiance, de
votre confiance.
Cette indépendance
recouvrée de nos Etats doit se manifester – c’est le vœu de la France et je m’en
suis entretenu avec chacun de mes homologues en Europe, vous le savez – aussi pour
que se réorganise le commerce international. Les échanges doivent se faire
selon les nécessités, les complémentarités et pas selon des spéculations sur
les matières premières, sur les coûts salariaux, sur les tricheries sociales et
fiscales. Chaque grande partie du monde actuel a ses niveaux de développement,
ses habitudes culturelles et sociales. Plus ou moins homogènes, elles peuvent
grouper leurs Etats et leurs peuples comme nous les Européens nous l’avons
entrepris depuis le drame de la Seconde guerre mondiale. C’est entre ces zones
de cohérence et hmogènes que des négociations s’ouvriront, à l’initiative de l’Union
européenne pour un nouveau traité fondamental encadrant les échanges, tout
autrement que leur divagation selon le traité de Marrakch.
De même – la France
espère en convaincre ses partenaires européens – devra se négocier la sécurité
collective et bien plus que des équilibres stratégiques, une solidarité
planétaire. Nous ne pouvons plus vivre en protégés des uns, en gendarmes des
autres. Les tâches pour le développement et le mieux-être de nos associés, à nous
Européens, les responsabilités de tous pour la sauvegarde de la chère Terre, l’évidente
dignité de toutes les familles humaines doivent fédérer les peuples du monde. Des
institutions démocratiques pour que l’Organisation des Nations Unies ne soit
pas que celle des Etats et que la décision du Conseil de sécurité, des droits
de tous pour circuler et s’installer partout à condition de respecter les lieux
et les cultures d’où l’on vient et les lieux et les cultures où l’on arrive. C'est
possible, c’est souhaitable, faisons-le.
Françaises,
Français, mes chers compatriotes, vous le voyez : pour mener à bien ce que
mon gouvernement, à mon appel et selon ma résolution que ces dernières semaines
vous avez vu et entendu grandir, a commencé de mettre en œuvre, pour soutenir,
notamment entre les Etats membres de l’Union européenne, les grandes décisions
que nous avons à prendre, dans notre intérêt et dans celui d’un monde avide de
trouver des axes et des repères, je dois militer parmi vous, avec vous. Je dois
donc me libérer des sujétions attachées à mes fonctions. Je n’ai pas exercé
celles-ci selon le mandat que j’avais sollicité de vous et que vous m’avez
accordé. A l’expérience et certainement par la grâce de notre esprit collectif,
de nos vœux que soit réalisé tout le souhaitable et non plus le conforme, j’ai
compris ce mandat, je veux l’exercer pleinement avec votre soutien et c’est
pour cela que je veux le solliciter à nouveau.
Pour me
présenter au plus tôt selon ce qui est entrepris, ce que je propose et fait
mettre en œuvre depuis peu, j’ai donc considéré que seule une nouvelle
campagne présidentielle, une discussion cette fois très avertie de nos
situations et de nos possibilités dès lors que nous prenons les moyens de
disposer à nouvau de nous-mêmes, donneraient à notre pays l’élan et la
lucidité, la force nécessaires. Pour me représenter sans attendre des années,
trop brèves pour qui ne fait rien mais veut demeurer en place, trop longues,
bien trop longues pour vous et moi, moi qui ai changé, et qui ai avoué devant
vous les résolutions qu’enfin je prenais, il me faut démissionner.
Ma décision
prendra effet demain à midi. Le referendum sur les réformes constitutionnelles
que j’avais exposées au congrès du Parlement, aura lieu à la date déjà fixée. Les
procédures législatives initiées par mon gouvernement qui demeure en place,
dirigé par Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre de ma confiance aussi bien
pendant cs longs mois qui vous parurent si peu différents de ceux antérieurs à
mon élection présidentielle, que pendant la mûe dont vous avez été témoin, ces
procédures continueront et aboutiront même si les lois doivent être promulguées
par un président intérimaire. Je n'ai aucun orgueil d'auteur. Ensemble, nous ne voulons qu'avancer, nous reprendre. Ces grands débats, ces grands textes adoptés par vos représentants vont nous aider. Je crois d’ailleurs qu’à l’avenir il serait
démocratique et de bonne conduite que chaque élection présidentielle se déroule en intérim de
la fonction suprême et que le gouvernement du moment ne soit plus que de
service pour achever ce qui aura été commencé par le président sortant et aussi
pour produire le bilan de celui-ci. Je crois aussi que les candidats auront à
proposer obligatoirement un projet de plan de développement économique et
social, englobant l’ensemble de nos objectifs et se proposant aux électeurs et
aux acteurs économiques et sociaux de notre pays.
C’est donc une
campagne d’un nouveau genre qui va s’ouvrir. Je serai candidat, non à ma
réélection mais à mon élection véritable sur le programme dont j’ai commencé la
réalisation avant même de l’avoir énoncé puis synthétisé. Je constate avec vous
que l’interruption de mon mandat, tandis que celui de l’Assemblée nationale
continue de courir permet de défaire une des rigidités de nos fonctionnements n, qui n’était pas dans l’intention de nos constituants originels.
Les mandats ne doivent pas coïncider forcément, et si je suis élu par vous,
selon la nouveauté que je veux incarner, nouveauté puisant beaucoup dans nos
traditions et nos expériences de l’après-guerre si justement inspirées par les
legs et acquis de la Résistance, du Front populaire et de la Libération, je
proposerai qu’ils soient constitutionnellement de durée différente, comme ils
le furent jusqu’en 2002.
Je suis
certain que vous comprenez qu’il ne s’agit pas d’une manœuvre pour profiter de
sondages dont nous savons ce qu’ils valent, combien ils sont rapidement
réversibles et qui sont actuellement très favorables, à mon gouvernement, à ma personne en confiance
et en crédibilité, et aussi à nos finances pour que notre emprunt de destin
national a été dix fois souscrit en cinq jours ouvrables. Il s’agit de rétablir
notre démocratie, en restaurant notre Etat, en retrouvant le sens civique et le
goût du service public, en ramenant notre jeunesse à une application nationale
de ses enthousiasmes, de ses élans. Il s’agit pour l’Europe et pour les pays de
son voisinage ou qui lui sont historiquement liés de reconnaître dans l’exemple
français ce que chacun peut faire chez soi, ce que tous ensemble les Européens
peuvent faire.
Si vous ne m’élisez
pas, tel que vous m’avez vu et entendu ces temps-ci, tel qu’en témoigne déjà ce
qui est commencé par mon gouvernement, tout en restera au point où tout avait
commencé de changer. Qu’y pourrai-je ? A vous de décider !
Quelles que soient
vos préférences au premier tour de cette prochaine élection présidentielle dans
moins de deux mois, quel que soit votre élu quinze jours ensuite, qui recevra
la responsabilité de tout poursuivre ou de tout arrêter, de pousser ou pas la
grande révision européenne inventant notre démocratie à tous, confirmant nos
solidarités en tous domaines de la monnaie, à la défense et aux droits sociaux, restaurant
notre marché commun,
que vive la France
et vive notre République.
A bientôt donc
mes chers concitoyens. Je rentre dans le rang pour vous laisser choisir, et –
je l’espère ardemment – tout confirmer de ce qui a été commencé.
premier jet, nuit du jeudi 26 au vendredi 27
Décembre 2013
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