jeudi 1 janvier 2015

journal d'il y a cinquante ans


Vendredi 1er Janvier 1965                    



S’Il nous a sauvés, ce n’est pas à cause des bonnes actions que nous avons accomplies, c’est par pure miséricorde, qu’Il nous a fait renaître dans les eaux du baptême, où nous recevons une vie nouvelle par l’Esprit Saint.
Epître à Titre (Messe Aurore)

Quant à Marie, elle recueillait tous ces souvenirs, et les méditait dans son cœur.
Lc. Ch. 2 (Messe Aurore)

Faites, Seigneur, que dans sa fraîcheur de Noël, ce sacrement du Christ rajeunisse toujours nos âmes, puisque sa naissance merveilleuse a fait disparaître de l’humanité toute trace de vieillesse.

Postcommunion . Messe Aurore

Le « camp » s’achève. Hier, renvoi de Philippe Cailleux. Parti seul en ballade. Malgré interdiction. Echec ouverture au groupe, à la communauté. Quel dommage.

Mercredi 30 : montée le long de la crête de Jilly avec Hugues, Christian, Jean-François. Merveilleux blanc. Le Viso émergeant lentement, ligne de crête comme une vague prête à déferler dans le ciel bleu.

Mardi 29 : grande randonnée, ballée d’entre Pelvau et Urine, col d’Urine [1], guère de vue, mais paysage tout différent. Beaucoup de joie à tracer dans la neige, la trace pour huit, vallée ombreuse et froide. Lente ascension vers le col. Déjeuner rapide. Le Père était avec nous. Redescente qui n’en est pas une.

Emerveillement au retour vers Valpreveyre [2], Bric Bouchet, orange et roux des sapins dénudés. Ciel bleu. Relief immaculé. Crête entre Bouchet et Mallaure [3] semblable à une couronne . dents de scie. Emerveillement.  Curieusement, la couleur orange, ou orange clair et lumineux, domine dans mon souvenir. Long arrêt à Valpreveyre. Beaucoup de photos.

Paysages des yeux. Paysages du cœur.

Le Curé si simple, si contemplatif, si pénétré de joie. Christina, yeux jaune vert, chandail lie de vin. De l’humour. Aide Hugues à se dépêtrer pendant la montée à la crête (une leçon pour moi).

Jacques, cet après-midi sur le télésiège. Choqué par idées trop arrêtées de son Père et de Boyau[4]. Estime que Michel ne se prête pas au dialogue. Dialogue impossible avec lui, pense-t-il, car eu une idée, et ne veut pas en démordre. N’argumente pas son idée. Ne la personnalise pas (Me citait l’exemple de notre discussion sur le suicide).

Vécu le poème de l’Albatros, hier soir. Benoît et Michel m’ont entraîné à réveillonner à l’Edelweiss. Perte de temps. Impression d’inutile, de déplacé. Nous sommes partis au bout d’un quart d’heure. Idem, au « bl popu ». Je me suis senti à nouveau moi-même, lorsque rentré au « blockhaus », je me suis occupé de notre réveillon. Préparation affectueuse de ce réveillon. Où serai-je pour le prochain Nouvel An ?

Prière que j’ai faite au nom de nous tous en la pensant profondément. Credo. Salve Regina. Comme c’est important, une année qui se termine. La jauger. L’offrir. Ut vigilantes cum Christo. Quel chant merveilleux que le Salve Regina.

*
*    *

Longue conversation avant minuit, hier, avec Michel. Lui ai dit, que je ne pouvais décider moi-même, que c’était au Christ à décider. Grand désir de le servir totalement, est certain. Désir de vie religieuse, de sacerdoce. Que j’ai désir, aptitude, mais y a-t-il appel ?

Idées du Père Boyer-Chammard :
- Dieu ne te dit rien : continue
- vie religieuse sait la vie de la facilité. Plus difficile de rayonner dans le monde laïc, témoignage, etc… (idées aussi de Maman, cf. la lettre qu’elle m’a écrite, et que j’ai reçue hier).

Michel m’a dit avec force, que je n’avais pas à attendre d’événements extérieurs à moi-même, que c’était à moi de décider, que mon désir venait précisément du Christ, que c’était à moi de choisir [5]. Lui ai redit mon incapacité à choisir, à me décide, ma faiblesse extrême, mon trouble, le noir dans lequel je suis.

M’a répondu
- qu’il ne fallait pas me complaire dans la « merde »,
- prendre les moyens d’en sortir : pour lui, évident que j’ai la vocation, me décider,
- frappez et l’on vous ouvrira.

Merci, Seigneur, de ce réveillon, de ces vacances avec ceux que j’aime, d’avoir mis Michel sur mon chemin.

Gloire à Dieu pour son pain qu’il nous donne,
                          Gloire à Dieu pour la joie d’être unis,
                    Gloire à Dieu pour le jour et la nuit, et la route,
qui fuit jusques à l’horizon.

Que 1965 soit plus belle que 1964. Que tu m’aides à choisir, Seigneur. Donne-moi de m’offrir à toi, de répondre présent, de vivre


[1] - orthographe à vérifier . 2 Janvier 2015…

[2] - idem

[3] - idem

[4] - François Boyer-Chammard, jésuite,  alors « père spirituel » des terminales à Franklin

[5] - affirmations saisissantes rétrospectivement puisque mon ami décisif (encore aujourd’hui dans ma mémoire et en conscience) et dont la vocation religieuse paraissait absolument assurée, certaine quitta la Compagnie de Jésus et rata, selon toutes apparences, deux mariages, avant – probablement – de se suicider, la mort accidentelle compte tenu de la météo., du site et de sa capacité de pilote d’avion étant peu explicable

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