Vendredi 1er
Janvier 1965
S’Il nous a sauvés, ce n’est pas à cause
des bonnes actions que nous avons accomplies, c’est par pure miséricorde, qu’Il
nous a fait renaître dans les eaux du baptême, où nous recevons une vie
nouvelle par l’Esprit Saint.
Epître à Titre (Messe
Aurore)
Quant à Marie, elle recueillait tous
ces souvenirs, et les méditait dans son cœur.
Lc. Ch. 2 (Messe Aurore)
Faites, Seigneur, que dans sa fraîcheur
de Noël, ce sacrement du Christ rajeunisse toujours nos âmes, puisque sa
naissance merveilleuse a fait disparaître de l’humanité toute trace de
vieillesse.
Postcommunion . Messe Aurore
Le « camp » s’achève. Hier,
renvoi de Philippe Cailleux. Parti seul en ballade. Malgré interdiction. Echec
ouverture au groupe, à la communauté. Quel dommage.
Mercredi 30 : montée le long de la
crête de Jilly avec Hugues, Christian, Jean-François. Merveilleux blanc. Le
Viso émergeant lentement, ligne de crête comme une vague prête à déferler dans
le ciel bleu.
Mardi 29 : grande randonnée, ballée
d’entre Pelvau et Urine, col d’Urine [1],
guère de vue, mais paysage tout différent. Beaucoup de joie à tracer dans la
neige, la trace pour huit, vallée ombreuse et froide. Lente ascension vers le
col. Déjeuner rapide. Le Père était avec nous. Redescente qui n’en est pas une.
Emerveillement au retour vers
Valpreveyre [2], Bric Bouchet, orange et
roux des sapins dénudés. Ciel bleu. Relief immaculé. Crête entre Bouchet et
Mallaure [3]
semblable à une couronne . dents de scie. Emerveillement. Curieusement, la couleur orange, ou orange
clair et lumineux, domine dans mon souvenir. Long arrêt à Valpreveyre. Beaucoup
de photos.
Paysages des yeux. Paysages du cœur.
Le Curé si simple, si contemplatif, si
pénétré de joie. Christina, yeux jaune vert, chandail lie de vin. De l’humour.
Aide Hugues à se dépêtrer pendant la montée à la crête (une leçon pour moi).
Jacques, cet après-midi sur le
télésiège. Choqué par idées trop arrêtées de son Père et de Boyau[4].
Estime que Michel ne se prête pas au dialogue. Dialogue impossible avec lui,
pense-t-il, car eu une idée, et ne veut pas en démordre. N’argumente pas son
idée. Ne la personnalise pas (Me citait l’exemple de notre discussion sur le
suicide).
Vécu le poème de l’Albatros, hier soir.
Benoît et Michel m’ont entraîné à réveillonner à l’Edelweiss. Perte de temps.
Impression d’inutile, de déplacé. Nous sommes partis au bout d’un quart
d’heure. Idem, au « bl popu ». Je me suis senti à nouveau moi-même,
lorsque rentré au « blockhaus », je me suis occupé de notre
réveillon. Préparation affectueuse de ce réveillon. Où serai-je pour le
prochain Nouvel An ?
Prière que j’ai faite au nom de nous
tous en la pensant profondément. Credo.
Salve Regina. Comme c’est important, une
année qui se termine. La jauger. L’offrir. Ut vigilantes cum Christo. Quel
chant merveilleux que le Salve Regina.
*
* *
Longue conversation avant minuit, hier,
avec Michel. Lui ai dit, que je ne pouvais décider moi-même, que c’était au
Christ à décider. Grand désir de le servir totalement, est certain. Désir de
vie religieuse, de sacerdoce. Que j’ai désir, aptitude, mais y a-t-il
appel ?
Idées du Père Boyer-Chammard :
- Dieu ne te dit rien : continue
- vie religieuse sait la vie de la facilité. Plus
difficile de rayonner dans le monde laïc, témoignage, etc… (idées aussi de
Maman, cf. la lettre qu’elle m’a écrite, et que j’ai reçue hier).
Michel m’a dit avec force, que je
n’avais pas à attendre d’événements extérieurs à moi-même, que c’était à moi de
décider, que mon désir venait précisément du Christ, que c’était à moi de
choisir [5]. Lui
ai redit mon incapacité à choisir, à me décide, ma faiblesse extrême, mon
trouble, le noir dans lequel je suis.
M’a répondu
- qu’il ne fallait pas me complaire dans la
« merde »,
- prendre les moyens d’en sortir : pour lui,
évident que j’ai la vocation, me décider,
- frappez et l’on vous ouvrira.
Merci, Seigneur, de ce
réveillon, de ces vacances avec ceux que j’aime, d’avoir mis Michel sur mon
chemin.
Gloire à Dieu pour son pain qu’il nous
donne,
Gloire à Dieu pour la joie
d’être unis,
Gloire à Dieu pour le jour
et la nuit, et la route,
qui fuit jusques à l’horizon.
Que 1965 soit plus belle que
1964. Que tu m’aides à choisir, Seigneur. Donne-moi de m’offrir à toi, de
répondre présent, de vivre
[1] - orthographe à vérifier .
2 Janvier 2015…
[2] - idem
[3] - idem
[4] - François Boyer-Chammard,
jésuite, alors « père
spirituel » des terminales à Franklin
[5] -
affirmations saisissantes rétrospectivement puisque mon ami décisif (encore
aujourd’hui dans ma mémoire et en conscience) et dont la vocation religieuse
paraissait absolument assurée, certaine quitta la Compagnie de Jésus et
rata, selon toutes apparences, deux mariages, avant – probablement – de se
suicider, la mort accidentelle compte tenu de la météo., du site et de sa
capacité de pilote d’avion étant peu explicable
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