mercredi 12 octobre 2016

livre - 20 ---- = dernières pages de la lettre ouverte à FH . suite 1 – avant annexes, documents, lettres




Monsieur le Président de la République,

des questions à poser et vous juger là-dessus selon vos réponses, leur fondement, et selon les faits. Ne les qualifions ni d’inventaire, ni de bilan, ni de réquisitoire.

Au point où nous sommes, nous et vous, de votre premier mandat, l’interrogation principale porte sur votre politique économique. De celle-ci, de toute politique économique dépendent le bien-être individuel et collectif des Français, l’aboutissement de leurs projets, l’équilibre et la solidarité de nos régions, de nos départements, de nos communes. Dépendent aussi la viabilité et l’indépendance des budgets publics, celui de l’Etat, celui des collectivités locales et donc notre solvabilité en tant que nation vis-à-vis des marchés étrangers, notre capacité à investir et à nous équiper, nos possibilités d’aider les peuples qui continuent à nous faire confiance dans des besoins qui ne s’apaisent toujours pas. De très grands choix ont été faits, en notre nom, par les générations précédentes. La Restauration des Bourbons après les guerres, gloires et défaites napoléoniennes, a su payer les frais des diverses occupations étrangères et équilibrer le budget de l’Etat. La Monarchie de Juillet a inventé les concessions de service public et a commencé l’équipement ferroviaire du pays, très heureusement continué par le Second Empire. Le sous-équipement et l’obolescence de notre Société nationale des chemins de fer sont aujourd’hui tels qu’entre Nice et Marseille, on a roulé jusqu’en 2013 sur les rails posés par Napoléon III. Celui-ci, novateur en tant de domaines décisifs, nous fit opter en 1860 pour le libre-écéhange avec le pays où était née la révolution industrielle : l’Angleterre. Pour notre agriculture, Jules Méline, trente ans après fit le choix inverse, le protectionnisme et la fermeture, mais nous étions exportateurs nets de l’agro-alimentaire et le plus souvent au second rang, juste derrière les immenses Etats-Unis d’Amérique jusques vers l’an 2000. Maurice Couve de Murville et Edgard Pisani, au risque avéré de mettre le général de Gaulle en grave difficulté de réélection en 1965, engagèrent dès Juin, le bras de fer avec la Commission européenne et nos cinq partenaires de la Communauté d’alors, pour que le financement des règlements agricoles soit acquis. Il s’en produisit un consensus laborieux – le compromis de Luxembourg en Janvier 1966, confirmé par celui, de même sens, intervenu à  lieu-date – sur le fonctionnement des institutions européennes. Cet accord continue de les régir. Auparavant, à l’orée de notre Cinquième République et du « règne » de l’homme du 18-Juin « revenu aux affaires » h – né pendant le très difficile débat parlementaire soutenu par Pierre Mendès France pour purger la question de la Communauté européenne de défense : Août 1954 – vous n’aviez alors que quatre ans et vous n’avez rien vécu de ce qui a été un rétablissement national sans précédent que l’établissement des Valois Angoulême puis Orléans à la suite de la guerre de Cent ans ou le retour de la France sur la scène internationale du fait de l’alliance franco-russe en 1891 – à cette orée donc, Maurice Couve de Murville que j’évoque souvent car l’ayant visité de 1970 à sa mort, soit trente ans moins quelques mois, discuta avec le Général (une chambre attitrée à l’hôtel parisien La Pérouse) sa nomination au gouvernement, comme ministre des Affaires étrangères. L’indépendance de l’Algérie et la mise en vigueur des traités de Rome établissant un « marché commun » entre six Etats de l’Europe occidentales, étaient pour lui sine qua non. De Gaulle était aussi de cet avis. Ce furent des décisions de politique économique, capitales. Dévaluation du franc, ouverture des frontières selon le calendrier inscrit dans les traités et que les « événements de Mai » 1968, firent même accélérer [1], le plan Rueff-Armand nous fit tenir échéances et défis. Valéry Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt, chacun ministre des Finances dans leur pays respectif, avant d’être à leur tête, convinrent du système monétaire européen. Je ne compte pas dans ces décisions historiques et fécondes, celle de Georges Pompidou, devenu le successeur élu du général de Gaulle démissionnaire, qui revint sur le 8 Août 1969 sur la décision du 25 Novembre 1968 de nous redresser sans dévaluer le franc. Jean-Marcel Jeanneney, autre éminent ami avec qui j’ai enquête, conversé, rédigé de 1972 à sa mort en 2010, eut dans ses dernières années, toujours vertes, saisie numérique et vérification des dates et chiffres sur les sites informatisés ad hoc, le projet de documenter la décision de politique pour une dizaine de celles-ci, en commençant par le traité Le Chevalier, en continuant par Méline et en allant jusqu’en Décembre 1958, quand proprio motu, Maurice Couve de Murville, en débat au sein de l’Organisation européenne de coopération économique, fit refuser l’élargissement en « grande zone de libre échange » de ce qui commençait à Six. Ludwig Erhard, alors ministre de l’Economie pour la République fédérale d’Allemagne, vint s’en plaindre à de Gaulle, qui maintint ce qu’avait obtenu son grand ministre. Le débat, quoique sans décision, devait ne plus cesser  Kennedy roudn Dillon round, Uruguay round puis le traité de Marrakech, les négociations de Seattle et aujourd’hui, occultes pour la plus grande part, celles tendant à une zone transatlantique livrant jusqu’aux marchés de nos communes à l’appréciation d’un juge américain selon que les appels d’offre resteraient de gré à gré ou en préférence nationale et européenne.

La décision qui vous a incombé dès la prise de vos fonctions, le 15 Mai 2012, pourquoi et comment l’avez-vous prise ? d’elle tout a dépendu, et probablement la stagnation française et l’incapacité de vos gouvernements à diminuer, à éradiquer le chômage. En campagne, la rumeur encensait de prometteuses lectures : vous aviez à votre chevet le livre-phare de John Meynard Keynes, vous compiliez témoignages, évaluations et historiques du New Deal de Franklin Delano Roosevelt. C’était formidable, c’était indicatif. Partant aussitôt dîner avec Angela Merkel, à Berlin sans attendre qu’elle se déplace comme en 1981, dès la Pentecôte, Helmut Schmidt l’avait fait pour s’entretenir avec François Mitterrand, vous avez changé, ou vous avez avoué. Vous êtes passé d’une école à l’autre, l’école de Chicago, le monétarisme, ont gagné sans que vous ayez combattu, sans surtout que notre opinion ait valu. L’alternative n’a pas été présentée, elle ne l’est d’ailleurs toujours pas – que grossièrement par le cortège des « extrêmistes » de droite et de gauche, faisant de notre « sortie » et de l’euro, monnaie unique, et de l’Union européenne, le remède immédiat et à tout. Il est vrai qu’en étant attentif, vous aviez commencé de biaiser quelques semaines avant le premier de scrutin : Pierre Moscovici, le directeur de votre campagne, après l’avoir été putativement de celle de Dominique Strauss-Kahn jusqu’au 15 Mai 2011, évoqua à quelques reprises un protocole qui permettrait de ratifier le traité de stabilité budgétaire signé par les Etats-membres ayant en commun l’euro, monnaie unique. Amender un texte par un autre, sans toucher le premier ? convenir d’un soi-disant pacte de croissance équilibrant l’effort de compression des dépenses publiques et doté d’une somme conséquente [2], montants mirifiques abondés par un plan Juncker [3]à l’entrée en fonction de la nouvelle Commission européenne, présidé par lui. Qu’ont donc financé ces « cagnottes » : ni Florange, ni Alcatel, ni Areva, ni Alstom n’en ont vu le premier million, alors qu’ils se chiffrent en centaines de milliards ? même la liaison ferroviaire, avec le ferro-routage qu’elle permettrait, entre Lyon et Turin attend le « bouclage » de son financement. Les immenses travaux européens pour établir des communications terrestres transnationales liant efficacement l’Ouest et l’Est du continent en réunification depuis l’implosion soviétique – proposés schématiquement par Jacques Delors, président de la Commission quand s’escalade le mur de Berlin sans coup férir, pour la première fois depuis date exacte Août 1961 – ne sortent toujours pas des cartons. Du moins à la connaissance du public. Si je me trompe, l’Union européenne ignore un des plus beaux arguments en sa faveur pour convertir les esprits à une appréciation plus positive de ce qu’elle construit.

Votre ralliement à l’école monétariste, à l’école de Chicago a ratifié la conception libérale et mondialiste la moins préoccupée des hommes. Les budgets de la France ont été désormais liés, au lieu qu’une acception consensuelle des examens annuels de politique économique des Etats-membres, à peine de sanctions si les « critères de Maastricht » ne sont pas respectés, soit convenue et que sereinement on examine surtout les voies et moyens de la convergence macro-économique de tous les Etats ayant en commun l’euro. Vous avez amputé notre Etat et, par voie de conséquence, nos collectivités locales, et vous nous avez privés de croissance. Comble, vous avez comme censeur à Bruxelles, celui qui vous doit sa place là-bas et qui, auparavant rue de Bercy, fut sans doute le ministre de l’Economie et des Finances le moins capable d’une longue et parfois prestigieuse ascendance. Celle-ci – droite ou gauche, au palais du Louvre, puis rue de Rivoli et enfin dans le bâtiment un temps futuriste que voulut Pierre Bérégovoy, bien à l’est de Paris [4]et vis-à-vis ou presque de la « très grande bibliothèque François-Mitterrand »  – avait été d’une continuité encore plus efficace que remarquable. Je ne fais pas l’éloge d’un dirigisme quoiqu’il ait été consensuel, de l’apparition de la version contemporaine de notre Etat aux alentours de 1860 jusqu’au programme ultra-libéral de Janvier 1986 (la privatisation de la S.N.C.F et de la Poste étaient entre autres prévus).

Ce procès vous donnant quitus de votre gestion, de votre présidence avec éloges ou indulgence, ou bien vous infligeant la peine maximum : l’inéligibilité à vie, devrait – je crois – vous poser la seconde question, ou vous reprocher une lacune importante.

Les contraintes du pacte budgétaire, puique vous l’avez ratifié, et le fixisme quinquennal imposé à notre vie nationale par le couplage de l’élection de l’Assemblée nationale avec l’élection du président de la République, chaque institution ayant un mandat de même durée selon une décision suffisant à elle seule pour condamner Jacques Chirac, suggèrent, permettent ensemble de se donner un outil qui fit merveille de la Libération à cette erreur inexplicable, commise par Lionel Jospin, dès son entrée à l’hôtel de Matignon. La suppression du Commissariat général au Plan [5], remplacé par un Conseil d’analyse économique auprès du Premier ministre, a privé le pays, et ceux que nous appelons les « partenaires sociaux » [6], aussi bien d’un lieu et d’un rythme de rencontres, d’un mode de travail en commission informelles ou encadrées, que d’un document faisant « ardente obligation » après un vote du Parlement consacrant les échanges de vue, les accords et prévisions de l’ensemble des acteurs de notre économie et de notre société, Etat, entreprises, syndicats. Une perspective quinquennale, précisément, et faisant loi pour le budget, pour les négociations salariales, pour les gestions « tripartites ».

Pourquoi ne les avez-vous pas rétablis, quitte à les mettre à jour selon de vastes consultations et un bilan de ces fonctionnements pendant un demi-siècle malgré l’instabilité gouvernementale de la Quatrième République et malgré les contestations et les alternances droite-gauche depuis 1981. 






à l’U.CK. Vannes pendant les cours de danse de Marguerite,
mercredi 12 octobre 2016
de 16 heures 27 à 18 heures 04





[1] - le quart d’heure d’exposé requis du secrétaire général du Comité interministériel dirigeant toutes négociations à Bruxelles sur le fonctionnement et l’approfondissement du Marché commun : Jean-René Bernard fortifiant de Gaulle, président de la République, dans a première intuition : respecter l’échéance du 1er Juillet 1968, c’est-à-dire la dernière étape du calendrier signé le 2( Mars 1957 à Rome par les Six pays fondateurs de l’entreprise européenne
[2] - date et montant de ce pacte

[3] -
[4] - chronologie de la délocalisation à laquelle tenta de s’opposer Edouard Balladur, par vaniteux attachement à un décor et une majesté séculaires
[5] - ce qui mit provisoirement sur le sable Henri Guaino, dernier titulaire d’une fonction consensuelle et prestigieuse, qu’il fallut aussitôt recaser, et avec lequel je concourus quelques semaines de l’automne de 1997 après que le Conseil d’Etat ait annulé la nomination de mon successeur à notre ambassadeur au Kazakhstan. La future « plume » de Nicolas Sarkoy vint pleurer auprès de Jean-Marcel Jeanneney fondateur de l’Observatoire français des conjonctures économiques. Etabli avec l’appui de Raymond Barre, Premier ministre, l’O.F.C.E. fut confirmé par François Mitterrand, confiant même à l’ancien ministre du général de Gaulle la charge de l’éclairer et conduire personnellement pour le premier sommet du G 7 à se tenir au début de son premier septennat.

[6] -

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