dernières pages de la lettre ouverte à FH –
avant annexes, documents, lettres
Monsieur le Président de la République,
il faut que vous soyez jugé. Jugé pour
ce que vous avez de votre premier mandat. Le procès – la forme des assises
pénales conviendra – et le verdict : acquittement, félicitations,
circonstances atténuantes, condamnation (aucune peine sauf deux : le
jugement du peuple puis celui de l’Histoire structurés et pas à l’estime ou
subjectivement ou relativement aux mandats à suivre après les vôtres, et la
seconde, l’inéligibilité viagère désormais à tout mandat public), le procès et
le verdict vous grandiront et surtout grandiront les Français. Nous sommes
conviés par chaque campagne présidentielle (elles sont de plus en plus
médiatisées) à toutes sortes d’évaluations et d’appréciations dont aucune n’est
outillée, pas même par le passé récent des candidats, car chacun est plus
professionnalisé de décennies en décenniesLe procès. Il n’y a plus même de
réelle possibilité d’examiner des aptitudes de base : la capacité de
travail intellectuel, la manière d’exposer, de résumer, de réagir et de faire
réagir. Des psychologies, des blessures intimes, des structures de la pensée et
de la mémoire, nous savons de moins en moins, que ce que des chroniqueurs ou des
essayistes ont assemblé sur chacun, ou sur quelques-uns, plus en vedette que
d’autres. Des quatre premiers présidents de notre Cinquième République, nous
savions, lors de leur candidature, beaucoup. Jacques Chirac, à sa troisième
candidature, n’était connu que d’image puisqu’il était sur scène et à incarner
un rôle, ce qui dispense de poser pour le nu : de fait, au premier tour
d’aucune élection y compris celles de 1995 et de 2002 où il l’emporta
finalement, il n’a pu obtenir plus de 20% de nos suffrages. Nous anticipions –
sans que nous le sachions tous – ce qui fut, et que va une ultime fois
maquiller, la félicitation universelle autour de son cercueil dûment drapé.
Le procès ne doit porter ni sur la
question de savoir si vous avez ou non trompé nos espérances, du moins
l’espérance de ceux qui ont voté pour vous, ni sur votre identité d’homme de
gauche en étiquette et fossoyeur du parti, voire de la crédibilité
gouvernementale désormais d’un programme ou d’une candidature se disant
socialiste. Et évidemment, si le sort me fait participer au jury, je ne
retiendrai pas à charge votre refus de me recevoir ou de me donner quelque
signe que vous me lisez.
Votre procès, l’enquête, le débat, les
dossiers, puis la délibération du jury selon vos avocats, ceux de votre choix,
ceux qu’éventuellement imposeraient les partis dits de gauche, selon aussi le
réquisitoire d’un procureur (dont le mode de désignation sera à trouver,
puisque ce genre de procès qui ne sera pas de Haute Cour, mais de simple
évaluation politique) seront simplement la mise en jeu de votre responsabilité.
Un mot souvent dans la bouche des politiques, soit pour échapper au jugement
courant en cours de mandat et revendiquer votre seule conscience en face de
l’Histoire et en face de nous, soit pour souligner à quel point une décision,
prise sans consultation et très discutée, est surtout courageuse. Première
acception, c’est la vôtre. Report d’appréciation, de jugement à la fin de
l’exercice, et même suspension de votre décision de vous représenter jusqu’à ce
que vous ayez tous les éléments d’appréciation de vos chances d’être réélu.
Vivre en politique est aussi pitoyable de part d’un peuple que rien ne
contraint – tant il a été favorisé par l’histoire et par la géographie, et tant
il continue de l’être puisque à intervalles très rapprochés se présentent avec
constance les occasions de tout rattraper de ce qui se perdait jusques là – que
de votre part. Une élection n’est pas une loterie, l’exercice d’un mandat peut
et doit s’apprécier avec rigueur : le droit des sociétés civiles et
commerciales, les statuts de la plupart des associations prévoient et
organisent le vote du quitus en assemblée.
Une responsabilité sans sanction n’est
pas une responsabilité. Le responsable répond du bon exercice des prérogatives
dont il a été revêtu. Il répond aussi à toutes questions que lui posent ses
mandants. Nous y sommes donc.
Procureur ? porte-parole de la
société, du peuple, des causes de toujours et des causes du moment, identifiées
pendant le mandat en procès. Procès ? mise en question selon des chefs
précis. Certains, si cette façon de faire en fin d’un mandat présidentiel
devait avoir cours désormais, pourraient être de droit, rituels, obligés. Ils
constitueraient d’ailleurs pendant tout le cours du mandat des repères, au
moins pour le peuple et pour ses élus, et aussi pour une conscience exigeante
et prudente (dans la perspective du procès en fin de mandat). Les autres chefs
d’accusation dépendront de l’époque, du cours du mandat. Le prévenu,
c’est-à-dire le président sortant qu’il se représente ou pas, aurait la faculté
de mettre avant toute publication de l’acte d’accusation, des points qu’il
croit fermement être de satisfaction, pas seulement pour les jurés, mais pour
l’ensemble des Français.
Idéalement et logiquement
salle d’attente à l’hôpital Chubert, mardi 11 octobre 2016
de 13 heures 50 (suspension à 14 heures 15.18) à 14 heures
30
Idéalement et logiquement, ce procès –
peut-être dois-je écrire des guillemets puisque sa nature juridique ne le
classe dans aucune catégorie actuellement existante et que la responsabilité en
cause, n’est ni civile ni pénale – ne peut se dérouler que si le prévenu – il
faut trouver un autre terme, ou se contenter d’appeler celui qui comparaît
selon sa fonction et sa situation : le président sortant – ne cumule pas
la charge de sa propre défense et illustration avec celle de sa fonction en fin
de mandat. En Grèce, même si ce pays n’est pas actuellement en situation
enviable ni à citer pour le passé en modèle des diverses délicatesses attendues
de la politique en général, j’avais compris qu’en période d’élections
générales, c’est un gouvernement qu’on appelle « gouvernement de
service » qui répond des affaires courantes. Il est formé par consensus
des partis représentés au Parlement (monocameral comme au Portugal, et dans les
bâtiments duquel le Premier ministre a ses bureaux) et composé de techniciens
ou d’experts. Le Premier ministre intérimaire est souvent le gouverneur de la
Banque centrale. J’en ai fréquenté un assidûment quand, dans les débuts
gouvernementaux du Pasok d’Anedras Papandreou, je dirigeais nos services
d’expansion économique (1982 à 1984). De la banque à cette haute position
d’autorité morale, Xénophon Zolotas, déjà âgé, m’impressionnait pas seulement
par sa francophonie, usuelle dans l’élite politique athénienne. Ce
« gouvernement de service » chez nous serait l’autorité la mieux
placée pour fournir les pièces nécessaires à une évaluation complète et
rigoureuse, pour produire un examen public de la situation sociale et
macro-économique du pays et ainsi se dégagerait une période suffisante pour que
les candidats à la succession présidentielle ou le président sortant – lui-même
se représentant – formulent, sans aucun recel de la fonction présidentielle ni
d’un quelconque rouage de l’Etat, leurs propositions et analyses. J’imagine
d’ailleurs que les candidats pourraient être appelés à participer à
l’évaluation du mandat qui s’achève. Je reconnais que ce serait une innovation
considérable dans notre vie politique et qu’en droit constitutionnel,
l’encadrement de ce débat et de cet intérim sera à préciser, et donc à étudier
avec soin.
Si ce procès devait avoir lieu, Monsieur
le Président de la République, quelle accusation ? et quelle
défense ?
C’est tout à votre honneur, ils seraient
aisés à indiquer et sans doute également à débattre, et soumettre à un examen
des faits, des dossiers et des alterantives. Pour plusieurs de vos
prédécesseurs, ce n’eût pas été aussi évident Bien des aspects de la gestion et
des caps suivis par votre prédécesseur donnent lieu – significativement – à des
procès selon des procédures qui ne sont pas à imaginer ad hoc.
à ma table de
travail, Reniac, le soir du même mardi 11 octobre 2016
de 23
heures 35 à 56
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