Chapitre 7
24/…/201… à 08:50
Les représentants des principales confessions religieuses reçus à l’Elysée
Le président de la République
avait convié la veille, par téléphone depuis Jérusalem, l’archevêque
d’Aix-Marseille, le pasteur… le recteur de la mosquée de Paris et le grand
rabbin de France, ainsi que les présidents des institutions représentatives des
Français juifs et musulmans, à venir se concerter avec lui.
Aucun communiqué n’a été publié
de part ni d’autre, mais il est généralement admis que le président Hollande a
redit – avec une sincérité saluée par les participants, en cela unanimes au
sortir du palais – que son voyage-éclair avait eu le spirituel pour objet
principal. Il aurait ajouté qu’il est vital qu’apparaisse dans le monde actuel
une autorité morale incontestable et que ses hôtes de maintenant, compte tenu
de la spécificité française et du rôle de notre pays dans l’histoire
spirituelle du monde, sont placés pour y contribuer. Décisivement, selon lui.
Il est généralement observé que
chacune des pratiques religieuses en France, quoique généralement en déclin, a
vertu d’exemple dans le reste du monde, notamment en Afrique du nord et dans
tout le continent noir, autant que dans les couloirs du Vatican. Il a été
remarqué que les archevêques de Lyon et de Paris, soutiens avoués des
manifestations de rue contre la
loi Taubira, n’ont pas été invités à cette conversation
œcuménique.
24/…/201… à 10:35
Concertation et perspectives monétaires
Recevant dans son bureau, en tout
début de matinée le président de la Banque centrale européenne accompagné du
gouverneur de la Banque de France, M. François Hollande a tenu une
télé-conférence à laquelle participaient depuis Berlin et Francfort la chancelière Merkel
et le président de la
Bundesbank. Le nouveau ministre de la Politique économique et
de l’Intégration européenne, M. Michel Sapin participait à la réunion ainsi que
l’attaché financier de l’ambassade de France à Londres. La présence d’un
fonctionnaire de rang relativement modesté à une conversation au niveau
politique suprême a peu de précédent en France. Elle est expliquée par la
nécessité d’avoir une vue informée sur la possibilité d’associer la Banque
d’Angleterre aux nouvelles stratégies de la Banque centrale européenne dans la
relation de celle-ci avec les instances politiques de l’Union et des
Etats-membres.
24/…/201… à 16:50
Première et très longue réunion du gouvernement concentré
Le président de la République a réuni
le conseil des ministres à l’heure habituelle, mais en raison de la pratique
nouvelle d’une collégialité peu observée sous la Cinquième République,
la séance – interrompue pendant un « déjeuner sur le pouce – s’est
prolongée jusqu’à seize heures trente. C’est le Premier ministre qui en a donné
l’économie pour la presse, soulignant que l’information sur les projets
gouvernementaux, est depuis une semaine donnée principalement et en direct par
le chef de l’Etat, mais que lui-même, es qualité, est désormais le porte-parole
du gouvernement tout entier, notamment pour communiquer les travaux et débats
en conseil des ministres.
M. Ayrault a rappelé, avec force,
le souhait du président de la République que les Français donnent leur avis,
leurs idées et contribuent à ce rebond national. Refusant de répondre aux
questions lui demandant de préciser le dernier de ces propos – le Premier
ministre a en effet dit, de façon sibylline, que les Français auraient aussi à
bientôt donner leurs voix – il a laissé au secrétaire général du gouvernement,
pour finir, la charge de lire et circuler le communiqué du conseil.
La plupart des ministres ont été ensuite
abordés par les journalistes accrédtés à l’Elysée, mais ils ont refusé de
répondre sur le contenu de l’ordre du jour et des débats, chacun insistant
cependant sur la liberté de parole donnée par le président de la République.
« C’est une habitude qui va se prendre vite et sur laquelle il sera
difficile de revenir après nous » a assuré l’un d’entre eux. Deux autres
ont annoncé qu’ils allaient chacun donner une conférence de presse d‘ici la fin
de l’après-midi.
24/…/201… à 17:15
Conférence de presse du nouveau ministre des Entreprises nationalisées
et des Services public, ouverte par le chef de l’Etat à l’Elysée
M. Louis Gallois, précédemment
commissaire général aux investissements et qu’on pensait devoir organiser un
commissariat général au Plan comme au temps de la Libération et de la
Reconstruction, a été introduit devant la presse par le président Hollande,
recevant au palais de l’Elysée. Le nouvau ministère n’a pas encore été gratifié
de locaux propres. Il st probable que ceux-ci seront aménagés dans le quartier
d’affaires de la Défense.
Le schéma d’une nouvelle
institution du Commissariat général au Plan a été donné par le président de la
République qui a cité le général de Gaulle – une fois n’est pas coûtume de sa
part – non seulement sur « l’ardente obligation du Plan » mais
surtout sur la
participation. Rien de cet organisme interministériel ne sera
mis en place, y compris son premier responsable, qu’en concertation avec les
acteurs économiques et sociaux du pays. Il seraut aberrant que les outils et
enceintes de la participation de ces acteurs au bilan et au projet national
périodique, soient décidés en chambre close par quelques-uns, n’étant
d’ailleurs pas directement de la partie.
Le domaine d’animation du nouveau
ministère a été défini, lui aussi, par le Président. Il ne s’agira pas que
l’Etat dirige directement les groupes et entreprises nationalisés. Au
contraire, ceux-ci administrés selon des formes à définir cas par cas mais pour
lesquelles les comités d’entrprises seront certainement les plus aptes. Le rôle
de l’Etat, temporairement unique actionnaire avec la possibilité de s’ajoindre
des collectivités locales et d’autres institutions publiques, sera de rendre
aux entreprises leur vocation originelle et de veiller à ce qu’elles concourent
au bien commun au lieu de courir à la seule rétribution des actionnaires et de
dirigeants cooptés sans véritable connaissance atavique de l’entreprise.
La nationalisation aura pour but
de créer et de maintenir une nouvelle culture d’entreprise, une nouvelle
mentalité socio-économiqu qui devra être pérenniser par l’actionnariat
populaire succédant à l’Etat, selon l’évolution et de l’entreprise et de
l’économie générale du pays et du monde.
M. Gallois, alors rejoint par M.
Sapin, ministre de la Politique économique, tandis que s’éclipsait dans une
discrétion complice le chef de l’Etat, a exposé les modalités des premières
nationalisations : celles intervenant dans le système bancaire a fin de le
consolider non plus à fonds perdus, et afin qu’il revienne à sa mission initiale,
le financement des entreprises et des particuliers. M. Sapin a rappelé que
l’emprunt citoyen à organiser dans les jours qui viennent aura deux
objets : le financement du déficit de l’Etat et celui des
nationalisations, ces dernières pouvant servir de gage. Les deux ministres
n’ont cependant pas détaillé davantage, laissant à la discussion parlementaire
la primeur des alternatives et des solutions techniques à retenir.
Le ministre des Entreprises
nationalisées et des Services publics a conclu en distinguant les entreprises
de son ressort. Sa charge est de rendre chacun à sa vocation originelle, ainsi
qu’au savoir-faire qui en a fait la force et aux besoins ou marchés qui les ont
suscités. Le service public n’est pas une entreprise même s’il est confié à une
entreprise, que celle-ci soit publique ou privée. Il n’est pas un centre de
profit, le mandataire ou le concessionnaire, en concertation avec l’Etat qui le
rémunère pour le service rendu à la collectivité, ajuste investissements, coûts
et prix, à charge pour le mandant de l‘y aider si nécessaire. La solidarité
nationale s’opère ainsi par des prix à l’usager qui ne sont pas, par eux-mêmes
et par destination, rémunérateurs. Les entreprises nationalisées sont d’une
autre nature et elles sont dstinées à revenir au secteur privé, même et surtout
si leur actionnariat à venir est populaire. A ce stade, le gouvernement ne
saurait dire si, à ce retour, elles seront cotées en bourse comme avant leur
nationalisation ou pas. La bourse ne peut plus être le principal financement
des entreprises quelles qu’elles soient. Ce qui a prévalu jusqu’à maintenant 1°
dévoyait les dirigeants du juste respect de l’intérêt et de la rémunération des
salariés au profit de ceux des actionnaires, et d’eux-mêmes, 2° mettait
pratiquement en vente permanente nos entreprises à la merci des prédateurs,
nationaux et surtout étrangers. L’équilibre et le financement des entreprises
doivent se faire par elles-mêmes et par les banques les acceptant ou
choisissant comme clientes et donc partenaires.
24/…/201… à 18:15
Conférence de presse du nouvau ministre des Relations extérieures, en
présence du président de la République
M. Pascal Canfin vient de donner
une conférence de presse – ce qui est très rare, car d’ordinaire le ministre
des Affaires Etrangères ne consent à cet exercice qu’à l’étranger tandis que le
point de presse quotidien par le porte-parole du Quai d’Orsay est censé suffire
à la presse nationale. Pas rare sous les Républiques précédentes où le chef du
gouvernement déternait souvent le portefeuille des Affaires Etrangères, la
tenue de cette conférence avec la participation du président de la République
s’étant déplacé en personne dans un palais national autre que l’Elysée n’avait
de précédent que son ouverture de la conférence de presse des deux ministres de
l’Economie, celui de la politique générale et monétaire, celui des entreprises
et de la planification.
M. Hollande a d’ailleurs borné
son propos à introduire le nouveau ministre et a caractérisé le rôle de
celui-ci : exécuter par les relations avec les autres Etats et avec les
organisations internationales à l’exception du fonctionnement de l’Union
européenne, la politique française telle qu’elle aura été déterminée par le
président de la République et débattue pour être approuvée par le conseil des
ministres. C’est le ministre de la Politique économique et de l’Intégration
européenne qui représentera la France quand le conseil de ministres à Bruxelles
se réunira pour les affaires générales. Il a également précisé que désormais il
recevra personnellement, en compagnie du ministre, chacun des ambassadeurs à la
veille de rejoindre une nouvelle affectation. Il a conclu en insistant sur la
collégialité gouvernementale pour définir la politique et les relations
extérieures de la France, et sur l’unicité et la sobriété de structures du
ministère chargé de les mettre en œuvre.
M. Canfin a rendu compte des
entretiens présidentiels de la veille à Jérusalem et résumé – chaque fois
approuvé par le président de la République – les débats ouverts depuis la fin
de la semaine dernière dans les différentes capitales européennes, ainsi qu’à
Bruxelles, par les déclarations télévisées de M. Hollande presque chaque soir
depuis le jeudi 18. La France a demandé à ses partenaires de l’Union une
réunion exceptionnelle du Conseil européen dès la semaine prochaine afin
d’examiner les moyens et institutions propres à relancer l’entreprise
européenne et pour décider des relations commerciales du grand marché unique
avec le reste du monde. Le ministre doit accompagner, d’ici ce sommet, le
Président qui a l’intention de rencontrer chacun de ses homologues afin de
développer librement cet ordre du jour d’exceptionnelle importance stratégique.
Il est évident pour M. Canfin, et
il devrait l’être pour chaque Français, que le président de la République ne
peut être seul à remplir le contrat. C’est le soutien moral de tout le pays,
c’est l’exemplarité des moyens choisis pour son redressement, dans sa plus
parfaite tradition d’ailleurs, qui donnent à la France la main pour le jeu
européen et l’adoption des propositions présidentielles de ces soirs-ci.
Le nouveau ministre comprend les
propositions présidentielles en tous les domaines comme une application
généralisée de la démocratie, garante du respect ou restauratrice des droits de
l’homme dans les pays subissant peu ou prou une dictature, contribution civique
et volontaire aux besoins de financement interne de notre pays, liberté de
conscience et votation motivée des électeurs pour leurs représentants et de
ceux-ci dans l’exercice de leurs mandats. La plus urgente de ces applications
porte sur le fonctionnement de l’Union européenne.
24/…/201… à 20:05
Sixième entretien vespéral du président de la République
Sur la troisième chaîne publique,
le président Hollande vient de s’entretenir en direct avec Madame Christiane
Taubira
Même brièveté de l’intervention,
même évidence d’une entente entre les deux personnalités pourtant de formation
si différente. Un partage des tâches, regardant la relation entre le Parlement
et le Gouvernement, a été défini. Au Premier ministre de répondre au contrôle par les assemblées de l’action
gouvernementale et d’en donner tous les éléments à la représentation nationale.
A la ministre de la Législation de rendre à cette représentation tous les
moyens de la proposition des lois, de l’amélioration de celles-ci quand les
projets sont ceux de l’exécutif, de la promotion des vœux des Français quand
ils sont du domaine législatif. Depuis trop longtemps et trop habituellement,
ls gouvernements succssifs réforment ce qui donne satisfaction et n’abordent
pas ce dont les Français sont mécontents et gênés. Le Parlement n’a pas le
monopole de l’écoûte populaire et le Gouvernement celui de l’expertise. Le
concours est mutuel.
La garde des Sceaux s’est
interrogée devant le chef de l’Etat, très attentif, sur deux points que la tradition
françaisse n’a pas examinés ni a fortiori adoptés depuis la Révolution et
Napoléon. Le premier est celui de la dualité de nos juridictions. L’autonomie
de la justice adminnistrative du droit administratif est-elle aujourd’hui, et
sera-t-elle plus encore demain une contribution au bon fonctionnement des
institutions publiques et une garantie des libertés individuelles. Il est
patent, notamment pour les grands emplois de la fonction publique, réputés
« à la discrétion du gouvernement », que les prudhommes et les
indemnités de licenciement assureraient mieux les carrières et donc la qualité
de ces cadres que le contrôle aléatoire du Conseil d’Etat. L’application
générale du droit du travail, dans le secteur public comme dans le privé,
accentuerait d’ailleurs le caractère non idéologique des nationalisations
qu’entreprend le gouvernement. Comme son nom et même son origine
constitutionnelle sous le Consulat et l’Empire, le Conseil d’Etat doit être
d’abord l’avocat de l’Etat devant les autres institutions, il pourrait même
remplir collectivement les mission du parquet puisque ses membres sont des
magistrats tout comme les représentants du ministère publique. Retroivant sa
mission originelle, le Conseil pourrait enfin en assurant pleinement la censure
des comportements publics faire cesser les empiètements de la Cour des comptes
en ce que celle-ci tend à évaluer politiquement des fonctionnements au lieu
d’en contrôler leur usage de l’argent public.
La ministre s’est ensuite
demandée si beaucoup de questions, notamment de société et plus
particulièrement dans le domaine de la bio-éthique ne gagneraient pas à être
laissées à l’appréciation des juges – de l’ordre judiciaire s’entend – plutôt
que de faire l’objet de législation à portée générale et donc théorique, voire
dogmatique. L’urgence ds cas particuliers ne se prête pas à la généralisation
de solutions à imposer. Le gouvernement, et elle-même – on l’a vu – ont été mis
sous pression au motif d’un projet de loi ne retirant rien à personne et
ajoutant des droits à ceux qui n’en avaient pas. C’est l’ambition générale du
texte qui a heurté certains tandis que la solution de cas particuliers,
examinés contradictoirement, serait, quelle qu’elle soit, saluée comme un
bienfait ou même du simple bon sens. On ne peut régler des cas-limites comme
l’euthanasie ou l’avortement, au regard de la loi pénale qu’en considérant
circonstances et personnes, et non pas en appliquant tel texte qualifiant à
l’avance tel comportement ou tel acte.
Le président de la République a
conclu qu’une société diversifiée comme la nôtre et mise à mal par le chômage
est d’abord une société de personnes. Celles-ci ne peuvent vivre la solidarité
nationale qu’en étant chacune reconnue. La loi est l’expression de la volonté
générale quand elle respecte et promeut les personnes. La garde des Sceaux,
ministre de la Législation a donc raison quand elle préfère revenir aux
définitions et aux objectifs de base plutôt qu’ajouter toujours plus à des
textes dont la finalité initiale est perdue de vue depuis longtemps et par le
plus grand nombre.
. AFP
24/…/201… à 21:10
Une proposition de la chancelière allemande.
Berlin – Le porte-parole de la
Chancellerie fédérale allemande fait savoir que Madame Angela Merkel,
maintenant que l’accord de formation du gouvernement de grande coalition est
« bouclé », a tout son temps pour préparer le Conseil européen
extraordinaire, devant répondre aux vœux français. Elle suggère qu’au lieu
d’entretiens bilatéraux dont les eux dirigeants sont coûtumiers, elle
accompagne le président de la République française dans son périple cvhz chacun
de leurs homologues à la tête des Etats-membres de l’Union. Ainsi se ferait
plus facilement, et tout à fait informellement, progressivement même, l’accord
souhaité par la France mais dont l’économie est à préciser en presque tout.
24/…/201… à 23:50
Le président Hollande vient de dîner, en compagnie de …, chez l’ancien
président Giscard d’Estaing, à l’invitation de ce dernier.
Le président Hollande vient de
dîner, en compagnie de …, chez l’ancien président Giscard d’estaing, à
l’invitation de ce dernier. Aucun des deux n’a voulu dire quoi que ce soit aux
journalistes qui s’étaient massés devant le 11 de la rue Bénouville,
dans l’ouest parisien.
24/…/201… à 23:56
New-York – Plusieurs quotidiens
de la côte Est,
ainsi que l’hebdomadaire Time donnent leur une ou la couverture au président
français. Le magazine s’inspire d’un tableau célèbre : le Christ sortant
du tombeau, les gardes épouvantés sortant malgré eux de leur sommeil et l’Eglise
à naître farandolant autour du triomphateur. En légende : « de
l’enfer des sondages, à Colombey, Jérusalem, Rome et l’Elysée ».
Journal du Président
Au palais de l’Elysée, dans la nuit du jeudi 24 … au vendredi 25…
201...
J’ai accepté aussi improviste qu’elle m’avait été adressée
l’invitation du président Giscard d’Estaing à venir dîner chez lui « en
toute simplicité » comme l’on dit dans son milieu.
Je ne l’avais jamais rencontré tête-à-tête : rang, génération
et ce que j’évaluais de son propre exercice du pouvoir qui m’est maintenant
confié, m’en avait empêché. C’est pourtant le seul de mes prédécesseurs que je
puisse pratiquement ou légitimement consulter. Le président Giscard d’Estaing
est certainement le fondateur d’une relation constante et à tout propos avec
l’Allemagne, le fondateur aussi des concertations entre principaux dirigeants
de notre planète, le fondateur enfin des prémisses du système monétaire
européen avec il est vrai des empêchements qu’il a voulu, ainsi – dans
l’hypothèse qui fût proche de se vérifier d’une victoire de la gauche dès les
élections législatives de 1973 – la fin de toite possibilité d’avances de la
Banque de France au Trésor public : assécher par avance la mise en œuvre
du programme commun de gouvernement (« socialo-communiste »
assurait-on à mes vingt ans).
A ma surprise, … et moi ne sommes pas seuls invités. V.G.E.
puisqu’à la Kennedy il apprécia qu’on l’appelle ainsi, me présente avec malice
Anne Sinclair au bras de Pierre Nora, Bertrand Delanoë et nous tournant le dos
par sa conversation avec Anne-Aymone née de Brantès… Ségolène. Dans l’instant,
ai-je apprécié ? L’habitude au parti et dans tout ce que j’ai présidé et
arrangé, la dynamique de groupe et le mélange de genre n’ont jamais été
recherchés : compenser, compromettre, arranger, reporter, parvenir… c’est
toujours déjà beaucoup.
Le maître de céans est non seulement majestueusement parfait
d’attitude et de premiers mots, mais il a une chaleur contagieuse à laquelle je
ne m’attendais pas. Je découvre une simplicité donnant envie de tout requérir à
cette évidente expérience, pas tant de la chose politique puisqu’il s’en est
fait éliminer facilement par un Jacques Chirac de bien moindres valeur et
capacité, mais de la question de l’intelligence au gouvernement. Proche et royal, sans doute l’apanage de ceux
à qui va bien notre fonction. Lui donc, je le comprends maintenant, et François
Mitterrand. D’autres ont fondé par haine leur ambition puis chacun de leur
jugement sur les concurrents et sur les adversaires. Le pays, nous tous en
politique, y avons perdu. La haine interdit tout et d’abord la réflexion qui
commence avec la considération du partenaire et de l’adversaire. V.G.E. le
rappelle pour de Gaulle et considère que la relation de personne à personne, après
Mitterrand qui en avait imposé à Kohl par son soutien dans l’affaire des
« euromissiles » et surtout par la réduction à fort peu du parti
communiste en France, a maintenant dénaturé le travail franco-allemand. Nos
autres partenaires sont induits en méfiance, nous cherchons entre deux des
accords par compromis, nous n’inventons strictement plus rien. J’en conviens.
Notre hôte ne s’en satisfait pas car il veut au contraire me féliciter de la
nouvelle tournure, prise ce soir-même, avec Angela Merkel, en coincidence très
heureuse de la formation du gouvernement de celle-ci. Il observe que mes
initiatives et propositions depuis huit jours ont contribué certainement à
l’accord de grande coalition. Et que celle-ci est désormais un atout décisif
dans le jeu français, qui en avait si peu depuis quinze ans. Je ne croyais
sincèrement pas avoir joué aussi finement.
Giscard, me sentant étonné, explique sa propre sensation. A un
certain niveau de responsabilités, niveau que l’on ressent intérieurement mais
auquel la généralité de l’opinion et des entourages vous croit situé avec
constance, nos comportements, beaucoup de nos décisions nous dépassent en ce
sens qu’une manière de « sur-moi » les produisent. Communément, on
dit être porté. C’est ce qu’il a aussitôt compris quand, regardant comme peu de
Français, l’autre vendredi la rediffusion du Dictateur, il m’a vu surgir, ressemblant et méconnaissable.
Il a donc voulu me rencontrer pour savoir, peut-être comment « cela »
m’avait pris, mais surtout comment je compte aller, jusqu’où et pour quelle
conclusion ?
Ni lui ni moi ne sommes des maniaques du suffrage universel. La
légalité, la fonction, nous avons cru qu’elles suffiraient à notre action. Mais
l’imagination et la conversion requièrent davantage. Pierre Nora est alors
intervenu. Placé à la gauche de Madame Giscard d’Estaing, il se penchait pour
s’adresser à moi, et c’est… Ségolène qui l’a encouragé. Anne Sinclair est
restée silencieuse tout le repas : son abnégation atteste que D.S.K. a
toujours eu quelque chose parallèlement à son insupportable imprudence
vis-à-vis de lui-même. C’est elle qui a su le mener jusqu’où il n’aurait pas dû
se faire avoir, comme c’est elle qui a certainement apporté à Mitterrand à
l’avant-veille du second tour de 1981, les dixièmes de points faisant la
différence : une ingénuité ravageuse pour caricaturer la propagande du
sortant – notre hôte de ce soir ! – et la réplique toute offerte :
mensonge ! mensonge ! à un candidat jusques-là peu attirant pour les
électeurs hésitant.
Ecoutant, assez distraitement, Nora témoigner de la position que
doit avoir l’homme de pouvoir, vis-à-vis de tout ce qui lui vient et de tout ce
qu’il ressent lui manquer, exemple Pierre Mendès France, selon Simon, son
frère, et contre-exemple, Vincent Auriol [1],
sans fonction en propre…j’ai compris le plan de table et le choix des
commensaux. …qui est mal connue des Français, sans doute parce que mon intimité
familiale, sociale, affective n’a pas été du tout scrutée comme le fut celle de
mon prédécesseur, avait compris avant moi. Il faut que Ségolène soit de nouvau
là. La politique nous a séparés, nous a fait rivaux. D’autres ont des idées de
gauche avant les élections, pas après. Elle n’a pas varié dans son inventivité.
Il semble que c’est son écoute par intuition du discours et des vœux délaissés
de nos compatriotes, qui porte ses maladresses et qui lui donne son brillant,
son ressort. … gardera sa place dans ma vie privée, mais cette vie ne peut pas,
actuellement, continuer telle quelle. Ségolène, elle aussi, comme Anne Sinclair
et comme … se tait.
Pierre Nora me prend dans ces considérations et dans ces
résolutions, puis dans cette diversion inattendue. Suis-je aussi lisible ?
Delanoë prend le relais. Giscard l’a voulu parmi nous pour l’exemple : il
avait un projet libéral absurdement qualifié d’avancé par Poniatowski, c’est ce
qui l’a perdu. La haine inspirée à Jacques Chirac par Marie-France Garaud et Pierre Juillet avait pour
argument la faiblesse du nouvau et très jeune, bien portant président de la République. La
mairie de Paris, sans laquelle l’ancien Premier ministre n’aurait pas survécu
ni matériellement ni politiquement, lui a été offerte par logique. Enjeu
immédiat des prochaines municipales certes, et Delanoë n’explique pas pourquoi
il ne se représente pas. Compter sur les divisions et fautes adverses pour
faire élire Hidalgo dont il est prétendu que j’ai été l’amant ? Delanoë
combine l’argument de faiblesse qui a joué contre moi jusqu’il y a huit jours
avec celui de la novation qu’incarnait Valéry Giscard d’Estaing, et qui
également perdu celui-ci, les autrs profitant de lui et des spacs qu’il
ménageait. Quelle serait ma faute, à moi, en ce moment ? Pour mon lointain
prédécesseur, c’est le risque de ne pas conclure ou faire conclure. L’élection
présidentielle est encore loin, je suis à peine élu. Le referendum n’est pas
une consécration, il m’amoindrira, la mise par écrit des réflexions que j’ai
introduites affadirait ce qui deviendrait une déclaration gouvernementale après
tant d’autres. Je n’ai finalement été gratifié que de compliments et de mise en
garde, pas de recettes. Pourtant Giscard insiste : j’ai les mains libres
et tous les autres, les opposants en France et nos partenaires dans l’Union
sont dans le vide. Lier la reprise économique à une émergence du vouloir et de
l’identité de l’Europe : le protectionnisme est un mot biaisé, celui de
réféorme continue de passer assez bien dans l’opinion sous tous ls
gouvernements. Vous êtes en bien meilleure posture que moi-même en début de
mandat. Vous avez un parti qui vous a suivi et soutenu pour une politique qui
n’était pas celle qu’il souhaitait et encore moins celle de vos électeurs. J’ai
dû fonder le mien, souligne-t-il. C’est la maîtresse de maison, proposant
directement de me resservir, qui a parole de poids : vous donnez une
impression d’équilibre personnel, de réserve, Monsieur le Président, et en même
temps vous êtes arrivé à surprendre. Je crois que tout va aller de soi. J’ai
choisi, à cet instant et pour elle, de prendre congé. Elle est la seule de ce soir
à n’avoir jamais « fait » de politique, ni sans doute à avoir opiné
publiquement. Mais elle n’a pas étonné son mari en se donnant la parole :
seule affirmative, parmi tous.
Ce dîner m’instruit donc différemment de ce que croient m’apporter
ses convives. Je sais maintenant comment conclure.
En sortant, nous avons été rejoints par Ayrault, avec qui j’ai fait
– seul – le tour du grand lac au Bois de Boulogne. A pied, au clair de lune,
les canards, le remuement des barques groupées à la rive, le gravier, les
montées et descentes du sentier souvent ajusté ou retracé depuis que, comme
tant d’autres, j’y ai parfois couru en tenue plus ou moins sportive. Jean-Marc
m’a dit combien il est satisfait de ce que nous vivons depuis maintenant une
semaine. Comme chacun des Français et comme la plupart des observateurs chez
nous et dehors, il a été surpris. Il va falloir maintenant ne pas tarder à
conclure ou à ouvrir une nouvelle partie. Me laissant avancer, il n’a pas
répliqué quand je lui ai répondu que je commençais à voir comment passer outre.
Il m’a alors avoué que si je n’avais pas bougé ces jours-ci, il allait le faire
lui-même, en toute loyauté certes, mais par nécessité pour l’ensemble de ce que
nous représentons et voulions initialement réussir. Je l’en ai félicité, nous
étions donc bien dans la même analyse et la même manière de réagir.
Reste à réussir le Conseil européen et à faire passer nos
propositions. Elles ont l’avantage que nous ne les disons que pour leur objet
mais en laissant toute liberté pour trouver ensemble les modalités. Le genre
que j’ai choisi pour nous exprimer depuis vendredi dernier est forcément celui
de l’idée à concrétiser, du but initial tranquillement rappelé en termes
consensuels et pas du tout un dispositif figé, donc vulnérable si ces lacunes
bien plus que certaines impraticabilités sont relevées. Nous ne pouvons
envisager le cas où elles ne seraient pas acceptées. Bien entendu, tout va se
jouer au cours de cette migration paneuropéenne qu me propose Angela. Il est
possible même qu certains de nos homologues veuillent se joindre à nous pour
l’étape et la conversation suivantes. Pourquoi pas ? intervenir sur nos
chaines de télévision parce qu’elles viennent de projeter, très suggestivement,
un vieux film rappelant les aspirations universelles … n’était pas plus
incongru que de penser, la semaine suivante, l’avenir de l’Europe en la
survolant pour de vrai, physiquement.
Ce matin a été une confirmation, musulmans et protestants parce
qu’ils représentent des minorités ou des moindres réseaux ont été vraiment
disponibles tandis que catholiques et juifs se croyant les uns et les autres
toujours en bonne position statistique et en situation d’influence, n’ont
marqué aucune curiosité ni aucun étonnement pour ma journée d’hier. Ils sont
paradoxalement bien moins « européens » et même universalisants que
le feraient attendre leurs origines respectives. Je ne les comprends pas.
Aurai-je dû faire signe aussi au Grand Orient de France, la franc-maçonnerie à
pied d’égalité et de représentativité avec les religions révélées. Elle st la
plus récente d’établissement chez nous. Ne « jouant » pas la
transparence, j’en crois l’organisation et les objectifs bien plus
appréhensibles pour qui l’aborde que ceux de l’Eglise catholique qui sait
fermer ses tabernacles et a compris le jeu des « enfants de
lumière ». Franc-maçon, moi ? c’est dit. J’admets que je suis allé à
des réunions. On n’est pas élu au suffrage universel direct par des réseaux ou
des apartenances. Les Etats-Unis ont eu Harding par achat des conventions, ce
n’est pas possible chez nous.
Dimanche
24 Novembre – 13 heures 50 & Mardi
26 Novembre – 15 heures & Mercredi
27 Novembre 2013 - 22 heures
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