dimanche 22 janvier 2017

pourquoi viens-tu si tard ? au pied du mur - livre en gestation - début de la réécriture du chapitre 4 . titre changé : vivre un patriotisme européen



Ce n’est ni, dans le monde actuel, une question d’échelle ni, avec nos frères européens, un emprisonnement progressif depuis plus de soixante-cinq ans dans des textes communs. La question d’Europe et la question de France sont aujourd’hui un seul défi et notre interrogation ne peut porter sur le pourquoi : si nous ne sentons pas cette solidarité à tous égards entre tous les Européens, et particulièrement entre la France et l’ensemble comme chacun de ses partenaires, Grande-Bretagne compris, il nous manque nos cinq sens. Que cet ensemble, autant que notre articulation de Français avec cet ensemble, soit défectueux, qui le contestera ? L’interrogation est sur le comment ? comment devenir ce qu’en puissance, en continuité historique, en nécessité économique et en évidence stratégique, nous sommes potentiellement  depuis près de trois quarts de siècle. Mais ne sommes toujours pas, au point de n’être plus même un enjeu pour le monde alors que un par un, à quelques-uns nous l’avons dominé et même formé mentalement, politiquement, culturellement depuis nos Grandes Découvertes.

Tous détruits, occupés, ruinés après la Seconde Guerre Mondiale, y compris la Grande-Bretagne, victorieuse sur le papier, et nous de même statut par un miracle très incarné, nous avons, chaque Européen – depuis, à des dates et selon des prises de conscience propres à chacun de nous – décidé d’être et de faire ensemble. C’était un acte majeur pour chaque peuple, les uns dépouillés de leurs empires coloniaux, d’autres revenus de leurs systèmes totalitaires qui nous avaient tous conduits à la guerre sinon au suicide collectif, d’autres encore libérés de la dictature d’un immense voisin s’étant imposé à la faveur du retrait des précédents.

Nous sommes chacun différent par bien des racines de toute nature, mais notre présence au monde d’aujourd’hui est analogue, nous vivons les mêmes nécessités, les mêmes appréhensions et nous avons, confusément ou précisément, conscience d’être ce qui manque au reste du monde pour ne pas incliner vers des folies, vers des régressions politiques, vers des conflits dangereusement contagieux. Enfin, nous réalisons que les différentes mûes de nos voisins de l’est ou du sud, ou de nos grands alliés nous menacent. La Russie, sous prétexte d’être frustrée du tout premier rang qu’avait l’Union soviétique, n’est plus expansionniste à la manière d’antan mais irrédentiste. L’Amérique a contesté, dès l’origine du Marché commun européen, son principe puisque selon elle l’unification du Vieux Monde avait un autre but que politique et économique : passer la main militairement. Wladimir Poutine, après dix ans d’observation sagace de nos capacités stratégiques et de la réactivité de nos psychologies, exploite le néant de notre défense, même si elle était concertée entre nous tous, Grande-Bretagne comprise. Donald Trump ne rompt pas avec ses prédécesseurs car la réalité du libre-échange transatlantique et les projets, sans doute périmés maintenant, de l’accentuer n’a jamais correspondu qu’à des prises de contrôle en Europe. Jean-Jacques Servan-Schreiber, il y a cinquante ans, l’avait prédit : l’étranger, qui n’est plus seulement américain, sait mieux utiliser notre grand marché unique que nous qui l’avons créé et organisé si laborieusement. 

Mais l’enjeu d’aujourd’hui n’est plus seulement la menace de très grandes puissances étrangères – trois, avec l’émergence de la Chine depuis vingt ans, au lieu de deux autrefois. Le risque est intérieur puisque la construction si peu achevée et à présent paralysée, est contestée par d’importantes fractions des opinions publiques européennes. Il n’est pas répondu à ce nouveau nihilisme, de plus en plus concerté d’un pays à l’autre entre les partis qui en vivent politiquement, électoralement et sans doute financièrement, puisqu’ils approuvent à très haute voix ceux qu’ils croient leurs alliés contre notre organisation actuelle, ou même leurs épigones : Donald Trump et Wladimir Poutine

Aucun commentaire: