toute suggestion, toute critique, accueillies : b.fdef@wanadoo.fr
Début du chapitre de
conclusion, qui sera surtout fait d’évocations de grandes rencontres – faisant
le mieux approcher ce qu’est le politique, et par déduction selon ses acteurs,
ce que peut la politique :
Moktar Ould Daddah,
Maurice Couve de Murville,
Jacques Fauvet,
René Andrieu,
Michel Jobert,
Pierre Bérégovoy,
Pierre Messmer,
Jean-Marcel Jeanneneney
Jean Charbonnel
Testament d’un encore vivant
grâce à d’autres que lui
Je me confie à vous, plus encore que
dans tout le corps de ce peetit livre. J’ai eu grand mal à l’écrire. Ce que je
tente de vous dire, je le ressens en vous autant qu’en moi, les mots nous
manquent, le regard et le désir sont là. Nous savons que maintenant la
conclusion nous appartient. Précisément parce que nous ne devons plus déléguer à
qui que ce soit la responsabilité de la suite. Nous avons expérimenté qu’un
seul est insuffisant, qu’en votant pour lui, nous le livrons à lui-même. Il en
fait les frais : Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et maintenant François
Hollande nous l’ont répété, et nous en périssons. Même plus vagabonds ou
désespérés d’opinion. Déjà inertes. La conclusion nous appartient, le
changement n’est pas un programme, il est la volonté de faire la décision, de
l’imposer à nos mandataires, de nous l’imposer à nous-mêmes. Le ressort de la
suite française est cette résolution. Et nous avons ensemble compris que cette
suite est européenne, et réciproquement. La rencontre en Allemagne de celles et
ceux qui le nient est sans doute bien ajustée puisque la fragilité de nous tous,
natifs de ce Vieux Monde, de ces vieux pays, de ces peuples anciens tellement
civilisés, tellement riches, chacun tellement subtil, est actuellement celle
des Allemands comme souvent. L’économie puissante, la longévité et la
collégialité au gouvernement depuis davantage de temps que partout ailleurs en
Europe. Si les négationnistes l’emportent du Rhin à Berlin et à l’Oder, la
partie pour notre suite à tous, sera plus difficile mais plus évidente, car la
réunion de celles et ceux qui nient a le résultat mathématique que même les
enfants connaissent.
Je n’ai pas peur car je sais qu’au pied
du mur, il y a partout la résolution. Et maintenant nous avons l’expérience
dans chacun de nos pays de ce qu’est, de ce que peut être l’illusion du refus.
Mais le refus ne doit pas être le refus des négationnistes, et de leurs
accompagnants jouant d’eux pour se faire choisir et gouverner solitairement un
pays, des peuples qu’ils croient chacun solitaires. Le refus que continue notre
enfoncement dans la tolérance du vide des gestions collectives, du nihilisme
des dispersions de nos patrimoines de toutes natures, est éclairé, motivé. Il
porte des structures de conduite tous ensemble.
Sans raison, par instinct ? j’ai
cru en François Hollande quoi qu’il se soit présenté à nous tous les votants,
les Français, sans passé, ni exploit, ni légitimité. Je réalise que ce vote
d’il y a cinq ans était adulte, pas seulement le mien, mais celui de millions
d’entre nous. Nous n’attendions ni sauveur ni salut. Nous commencions de
réaliser que la politique – et je le constate de plus en plus maintenant,
l’entreprise surtout, qu’elle soit individuelle ou de taille et d’enjeu
considérables – n’est pas l’affaire d’un seul, qu’elle est profondément
collective, qu’elle est d’essence collective. Pas parce qu’elle est la gestion
du grand nombre et de beaucoup de sujets, d’affaires, de dossiers, de
circonstances – prévisibles, imprévisibles – mais parce qu’elle n’est vraiment
possible que portée à tous, par une réflexion commune, par une ambiance que nous
créons à tous et qui devient l’esprit d’une entreprise – celle-ci au sens
économique et financier – mais aussi d’une entreprise au sens de l’aventure qui
a sa date de commencement et sa date d’aboutissement. Et cela ne s’est pas
fait, nous avons laissé faire.
J’ai essayé – avec vous qui vouliez bien
m’accompagner dès les premières lignes – de présenter des antidotes, de les
évaluer. Il nous faut les choisir et prendre toutes ensembles. J’ai longtemps
cru à la conversion de l’élu d’il y a cinq ans, conversion par intelligence.
Les circonstances ne faisaient pression que lentement, les éphémérides de
l’impuissance et de l’échec faisaient une chaîne chronologique atterrante mais
ne nous liaient pas encore. La leçon – je ne sais si François Hollande l’exprimera
lui-même, je le lui ai demandé après tant de suggestions au jour le jour ou
presque depuis son investiture par son parti d’origine – est la péremption des
anciennes manières d’exercer le pouvoir.
Pendant quatre vingt dix ans, autant
dire un siècle, la France s’est gouvernée, sauvée, perdue, reprise selon une
commission parlementaire appelée gouvernement. La mûe apportée par le général
de Gaulle n’a pas été la mise au goût du jour de notre ancienne monarchie,
faussement interprétée comme une autocratie alors que fondamentalement elle
avait toujours été le respect et la culture référencée du bien commun.
L’élection du président de la République au suffrage au suffrage universel
direct a été la première étape d’une remise de la décision, autant dire même du
pouvoir, à nous tous. Nous en sommes restés là, malgré les efforts des premiers
successeurs du fondateur.
L’existence humaine est une relation,
avec nous-mêmes, avec les autres, nos frères de condition, nos analogues. Le
cœur de chacun est un mystère, davantage encore pour lui-même que pour les
autres plus libres de considérer, du dehors, les entraves et les possibilités
de l’envol.
La relation, j’ai eu la chance très
répétée dans ma vie, de l’éprouver avec des hommes, des personnalités dédiées à
la politique. Trait commun : considérer la politique comme le mystère et
la responsabilité d’un peuple que l’Histoire désigne pour être et demeurer un
peuple, moyennant à chaque génération sa propre réévaluation et le consentement
à lui-même et surtout à l’espérance et aux moyens d’être encore plus lui-même.
Le politique n’est pas discursif, il est la conscience de beaucoup.
Je le dirai plus clairement – je crois –
en disant les dettes de ma reconnaissance. Je le fais brièvement, devant vous,
même si vous ne les avez pas connus, même si peut-être, puisque l’amnésie
caractérise aujourd’hui commentateurs, présentateurs autant que les acteurs
dont ils sont les faire-valoir. Ce va être ma conclusion. Tous ont physiquement
disparu. Aujourd’hui, pourtant, ils existent et me structurent, puissè-je vous
faire ressentir qu’ils sont disponibles pour tous, et qu’en sus nous pouvons
chacun en rencontrer d’autres mais du même bois, du même esprit, de la même
fidélité à autre qu’eux-mêmes et leurs biens. Nos aïeux certainement, nos
enfants – je l’espère, et gratifié tellement par notre fille, je le crois – ont
fait, pourront faire ces rencontres, et même ont été et seront de celles et
ceux que j’ai rencontrés. Car je n’ai rencontrés que quelques-uns, mais ce fut
pour tous.
Aujourd’hui [1]où je
finis de vous écrire, après tant de tentatives toutes fondées – par une erreur
tenace que je croyais la simple et nue espérance – sur la possible, probable,
logique conversion d’un président revenant à des convictions et donc à des
jugements répondant aux circonstances sans s’en laisser imposer par celles-ci,
nous répondant finalement parce que son propre recours contre lui-même serait
de nous écouter… aujourd’hui, maintenant que tout a disparu des vieux usages et
des vieux rites, même s’ils paraissent encore en scène, c’est le vote entre
gens se reconnaissant de gauche pour choisir quelqu’un qui… Ils sont courageux,
aucune chance d’aboutir selon les rites anciens d’une élection et d’un nouveau
quinquennat. La primaire d’autres n’a été que la trouvaille d’un chef par
élimination. Enfin, il y a eu des initiatives et du spectacle, et la redite
d’un diable utile à tous les professionnels y recevant la fonction de sincère
sauveur. Aujourd’hui, du civisme. Et ce même jour, le dixième anniversaire de
l’Abbé Pierre, les réflexes qu’il raviva tant de fois. Je l’ai connu et
accompagné au plus crépitant et douloureux d’une méprise qui s’est appelé
l’affaire Garaudy, autre forme très achevée du négationnisme, alors que pour sa
cause, comme d’ailleurs pour la cause des extrêmistes d‘aujourd’hui, ceux
d’Europe, autant que les égarés du djihadisme ou les soutiens de Wladimir
Poutine et maintenant de Donald Trump, il y a du vrai et de la lucidité à
l’origine de ce qui deviendra, est devenu un odieux parcours. L’Abbé Pierre,
une solitude, un secret spirituel, un tempérament s’exorcisant eux-mêmes par
l’obsession des autres faite d’une empathie avivée par le scandale. Un
homme-cri. Coincidence des dates, au lendemain d’un anniversaire, celui de
l’événement sans doute le plus symbolique de notre hisstoire nationale,
l’exécution capitale du roi. Nos crises de légitimité – nous en vivons une de
plus – nous font, font la France.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire