vendredi 15 août 2014

poèmes au Brésil - 31 -




                   Toutes joies

Quand tout est prêt, tout est consenti,

quand il faut seulement lire à ton regard l’attente

pour commencer,

quand retentissent depuis longtemps les coups et le gong

du sang et du cri retenus à nos tempes, à nos ventres,

quand tremblent les cuisses et les bras, les lèvres

de l’effort à venir, de l’assaut lent à contenir,

quand viennent les élans et les mouvements

ne plus rien retenir, à ne donner que le tout,

quand s’effacent les instants du passé et s’unit cet avenir,

à ne se savoir plus qu’au centre chaud du monde retrouvé,

quand vient comme une source, quand arrive comme un bond

le cheval de galop qui ira ralentir jusqu’à nous,





s’élève et enveloppe la silhouette

unique que nous avons choisie, embrassée :

la nef singulière, la nuée primitive

des chants séraphins sans musique

et de l’enlèvement ultime à ce ciel

où nos corps prolongés l’un de l’autre

respirent et vivent la sensation fantastique

d’être toi encore moi, et moi devenu toi

de la tête à nos pieds, de ce bras au sexe

l’être a trouvé son essence et la dimension définitives.





Tu ne gémiras  et je ne respirerai point,

nous guetterons poindre en nous

cette seconde fois où au haut plateau

d’après le dernier instant à gravir,

nous établissons nos haleines et nos cœurs

et la chambre se poudre d’or par nos larmes

et les gestes sont si lents désormais

que le temps nous répand autrement.

L’éternité récapitule ses peines et sa naissance,

nous avons une autre connaissance, celle assouvie

de ce don qui a ouvert toute porte à nos mains,

tout antre à notre épieu, toute vie à nos poèmes,

et ce qui s’étale à présent comme l’inoubliable prairie

tisse le tapis qui nous roulera bientôt endormis,

enchâssés encore l’un de l’autre, emboîtés,

fondus par la solitude disparue, par la communion inconnue,

par l’onde inaudible faisant parfois là tressaillir

les muscles à l’unisson venus pour luire la chair

de nos âmes et le récit ensemble de nos songes.



Les gisants n’ont pas d’autre mort que ce repos,

et les mains qui ont voulu tout le corps nanti

et parcouru par le sexe et la bouche et le regard

de l’autre attentif et prudent jusqu’au scrupule

quand il fallait encore monter par les détours,

elles reposent à présent au ventre et au coeur

des jumeaux réunis par le cri et par l’abandon, et la

suprême écoute du sang reflué et du baume renversé.



Les vases et les courses ne s’entrechoqueront plus,

les amants n’auront plus le regard de la question,

les morts qu’ils ont voulu devenir à leur entente

refuseront de jamais ressusciter, et la chape soyeuse

jetée en nimbe et en rêverie éveillée par le plaisir

qui dure encore, pour toujours va garder l’empreinte

des menuets, des baisers, des allées vives à toutes joies.

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