Chapitre VII
Sur parole
Elle se releva, les releva. Elle dit,
explication ? évidence ? promesse ? mardi 15 avril
2014 11 heures 32 . . . pas avant
la publication de nos fiançailles. Il entend le stupéfiant, pas tant l’interdit
que l’énoncé d’une perspective qu’il n’a pas du tout envisagée. Il est seul au
monde puisque sa mère est morte depuis dix-huit mois. Selon sa fratrie, c’est
celle-ci qui a gouverné ses amours, empêché ou poussé, déploré une rupture et
abominé une liaison. Il vit depuis une trentaine de mois aussi loin que
possible de ses bases sociales, affectives, professionnelles. Sur place, une
relation féminine et chaleureuse, et dans son pays un lien qu’il ne sait ni
définir ni souhaiter ni entretenir, mais qui est né. Sans confident que lui-même,
il entend ces mots. La scène, surtout la réplique à l’esquisse de ses gestes, à
sa résolution d’en faire sa maîtresse ce soir-là, en tout cas de
l’entreprendre, a un décor. Sa résidence, distincte des bureaux dont il assure
le premier fonctionnement en date, et qui va le changer de l’hôtel.
L’appartement est local, grossier de finitions, de menuiseries diverses.
Quelques-uns de ses homologues ont accepté les villas proposées, mais il a
observé que ce serait une cité du genre qui favorisa l’assaut des Boxers dans
un pays qui n’était pas prévisible à l’époque, pas plus que ne l’et celui-ci
débute seulement sa vie propre. Il avait une tierce solution, mais quoiqu’en
vue par son accréditation, il est totalement subordonné à des gérants de tout
et qui ne sont pas sur place. Ils visitent ensemble, elle est très jeune, trente ans de moins que lui, davantage même.
Ce n’est pas à cela qu’il est sensible, ce dont d’autres s’énorgueilliraient,
mais à une beauté calme, à un équilibre évident. Il a plaisir à passer du temps
avec elle, la chronique de la séduction a été particulièrement lente, ils en
sont à leur siixème mois, l’appartement n’est pas encore vraiment meublé, mais
il y a un grand lit et à son haut, le long du mur, une belle surface de bois
moderne où poser de la décoration ou rien. Pas de draps encore. Assis, tous
deux, l’un contre l’autre, ils essayent matelas et sommier, il la touche, le
chemisier, le buste à la peau pâle, les seins à leur soutien. C’est alors
qu’elle l’arrête. Naguère, sans que cela décide encore des fiançailles qui ne
se firent dans son esprit que quand elle se crut enceinte, il y avait eu éjà
cet arrêt sur image. La prise de conscience, image mentale de la vie qui se
décide d’elle-même. Sans texte. Ce soir, il y a plus. Ils ont descendu
l’escalier, l’immeubke à trois niveaux, n’en a qu’un socialement, la
nomenklatura au pays qui a inventé la chose, ou plutôt une colonie de ce
pays-là, apparemment effondré depuis peu, mais en réalité… elle en est, elle
l’a charmé en interprétation d’une pièce contemporaine d’un de ses auteurs à
lui et par sa manière à elle d’interpréter la psychologie de contrainte et
d’évasion qui a gouverné une grande partie du monde et qui avait là où ils sont
ses sites stratégiques. Puissance et sensation pour lui d’être à un point de la
géographie et de l’histoire universelles, décisifs à cet instant. Voici qu’elle
ajoute, surcharge ledit instant en lui donnant une vibration toute personnelle.
D’aileurs, je suis sûr que je serai heureuse avec vous. Il lui a ouvert la
portière de sa voiture de service, c’est ainsi qu’elle continue et c’est en ré-écoutant
une prophétie et une phrase, jamais entendues en trente ans de pérégrinations
du cœur, plus encore que du sexe, qu’il s’est endormi et réveillé. Décision…
sur constat. vendredi 18 avril 2014 à l’UCK . 17 heures 55 à 18 heures 15
Plus tard, plus loin, la veille de son
ré-envol, l’hôtel, la chambre d’un souvenir autre, mais plus confinée. Aussi
inattendue, la saisie d’un instant. Elle le surprend chaque fois, bien après,
deux décennies ensuite, loin d’elle dans toutes les dimensions sauf celle où
vibre encore quelque chose sans nom qui est plus que du souvenir, que de la
mémoire, que ce qui se compare aux braises ou à la cendre, il comprendra
qu’elle avait porté d’avance le moment, moment de la déclaration, moment de la
défloration, si c’en fût une, s’il en était le dédicataire, ou seulement
l’instrument à date obligée, puisqu’elle allait repartir, mais c’est quand avec
lui qu’elle le voulut ou le fit. Ce qui n’est brouillé est le profil, les joues
pleines, les cheveux qu’elle retient, elle se prépare pour le dîner qu’ils vont
avoir dehors. Et tout tombe ou tout apparaît, elle est nue pour la première
fois à ses yeux, pour son regard, il la photographie mais pas en preneur
d’images ou en metteur en scène, il la retient en lui, il la blottit en chair,
en silhouette données. Il a décidé qu’elle était sa femme, il a considéré
depuis son faire-part d’émotion et l’interdit qui a été proféré dans la même
phrase qu’elle l’était putativement. Il a donc sans difficulté tout retarder de
ce qui se fait vite quand on est d’accord et d’amour. Il n’a pas conscience de
l’artifice et elle a laissé d’autant plus le rite de la réserve s’installer
entre eux, qu’au contraire de lui, elle n’était plus décidée à leur union quand
elle est revenue. Revenue pour s’en aller et prendre congé. Il a ensuite repris
la main, l’a maintenue dans le calendrier initial et organisé la parenthèse. La
voici qui couronne tout, elle est nue, et comme il la regarde en époux, en
fiancé, en partenaire d’éternité, il reçoit une tout autre beauté, il jouit
d’une tout autre nudité que selon ses habitudes et ce succès masculin d’arriver
à des fins bien impersonnelles mais propres à se croire exaucé. Il la
photographie comme il peut, mal assuré de la lumière, du décor. Elle pose sans
habitude, sans science, naturelle, plus tout à fait adolscente, la pudeur étant
hors sujet, mais sans obscénité. Elle est nue, il la photographie, ils sortent
ensuite et vont dîner. Elle s’envole le lendemain, entretemps elle a tout fait
sans qu’il en sache, en voit, en ressente rien, assise sur lui, du sang sur le
drap, à leurs sexes.
Il y aura le profil de la catastrophe,
une moue paresseuse, presque de la veulerie, c’est elle donc ? son hésitation
qui naquit, aussi prenante qu’avait été sa certitude.Trop d’images, pas assez
de vie, un cadre trop tourmenté, l’instabilité donnant tous les assauts et
corrodant tout, il souffre de ces ruines. A l’étape, venue avec les papiers
d’identité et les traductions certifiées pour leur mariage, alors qu’à sa venue
précédente, elle n’avait atterri que par égard pour lui et le prévenir en
personne de leur séparation, elle s’agenouille sur le lit d’hôtel et tandis
qu’il est en proie aux fatigues de la route et du doute, qu’il ne sait plus
s’il construit ou détruit, que se penchent du dehors vers ce qu’il est en train
de vivre et croyait solide, achevé, ses souvenirs de décennies – là – en
vacances familiales sous les montagnes, à flanc des boisements vert sombre, et
elle lui tend, cambrée, les bras, le visage, la chevelure posés sur le blanc
des draps, dimanche 20 avril 2014 18
heures 20 à 18 heures 44 l’orée sombre,
forestier d’un premier plan qui ne l’émeut pas. Tout simplement, il n’a aucune
envie de la prendre, de la pénétrer, il est complétement ailleurs, il n’est
même nulle part, hors e toute dimension tandis que l’invitation par l’ombre,
d’ordinaire prometteuse, ne l’appelle en rien. Ils sont sortis, et montant
dîner par la route unique qui a organisé le village sur l’autre rive de son
torrent sous glacier, il voit comme un gage de quelque chose d’autre le
rougeoiement des roches par le couchant du soleil. Il n’y a plus personne dans
son existence que des passants, pas même des compagnons de condition ou de
perplexité. Un peu plus loin dans ce mois d’été, il apprend l’inconstance des
certitudes tandis qu’elle lui enseigne sa manière à elle d’avoir envie,
peut-être pas de lui, mais d’une étreinte, la leur donc puisqu’il est là. Dans
le mois d’un nouveau départ qu’il ne veut qu’en suspens de leur commmencement,
elle le remplace, coucher de soleil aussi mais en direction de l’arctique, et
lui en fera part avec commentaire encore un peu plus loin dans un temps qui
n’est plus du tout le même pour l’un comme pour l’autre. Détail de l’emploi de
son temps, en fin de journé, au retour de chacun à ce qui doit être
l’habitation commune, ils font donc l’amour, heure fixe, lieu fixe, rituel sans
doute fixe. Celle qu’il a tant aimée de chair et de tout, fait part sur le même
ton après lui avoir dit combien elle se réjouit de la mort de sa mère qu’elle
considérait comme l’empêcheuse de leur union, elle a eu un amant un an après
eux et son dernier mot : pendant quinze ans, tu as été tout pour moi, et
elle assène la remarque d’un ton le plus simple, je croyais que ce serait très
difficile, ce fut très facile. samedi 19 avril 2014 18 heures 11 à 19 heures 30
Coup de foudre et relativisation,
concentration de soi lové sur une certitude. Il en a fait l’expérience
concrète, dans un autre pays, pas très longtemps auparavant, mais les distances
intercontinentales, transocéaniques, les familiarités ou les impossibilités
linguistiques valent et pèsent bien plus que des années pour séparer les
épisodes d’une existence humaine, surtout errante, anaérobie. Traité par des
relations professionnelles dont il a la supériorité hiérarchique, il dîne dans
un patio dont l’environnement végétal le pénètre de partout. Rien à faire qu’à
se laisser vivre, tranquille, boire, savourer l’exotisme mais dans sa langue,
se reposer d’une journée et des années, ne rien prévoir ni attendre, illusion
de la succession des affectations : elle fait croire qu’une vie avance,
s’approfondit et que des acquis se rapportent à chaque étape. Quand le cycle se
sera terminé, il aura des objets, des pages de journal, des boîtes de photo. et
quelques numéros de plus dans la liste de ses liaisons, chacune ne survivant
pas à son départ pour ailleurs. Elle entre, brune comme toutes les filles de
l’endroit, la peau mate. Rien de particulier, sinon que … la foudre tombe.
L’orage au sens météorologique et un choc intime à l’entrée de cette jeune
femme dans son champ visuel. A peine échangent-ils quelques mots devant des
témoins qui ne savent pas l’être. Il entre en obsession, l’invite dans les
trois jours à déjeuner, elle le guide dans cette capitale célèbre par ceux qui
l’ont conçu et même prophétisé de plan, de sites et de coordonnées
géographiques par un grand saint du siècle précédent qui n’a jamais traversé la
moindre mer, encore moins cet océan. Plus que des rêves, la réalisation de
songes. Elle ne répond à aucun modèle, ne va au-devant d’aucun manque ou projet
qu’il lui confierait, il n’a pas du tout le jeu habituel qui, en autobiographie
et enthousiasme pour le moment à précisément et immédiatement vivre, a
généralement captivé et même séduit. Contraste absolu entre la force de cette
soudaine habitation, sanctionnée et recueillie par le tonnerre de la nature, la
pluie diluvienne, bruyante et chaude qui vient avec, et le calme d’une relation
apparemment quelconque. Ils déjeunent, il ne peut s’exprimer ce qu’il ressent,
elle est sans pareille, elle est parfaite, bien entendu douce, jolie, ferme,
personnelle, cultivée, les mains, le visage, le physique et la voix, oui, sont
parfaits. Tout. Le langage et le sujet communs sont ce qu’il peut découvrir de
ce pays et ce que le sien peut entreprendre ou doit augmenter avec celui-ci.
Ils conviennent qu’il viendra la visiter un moment du soir, après avoir écourté
une obligation. Il est accueilli, la conversation est limpide, banale, pendant
des heures d’un bien-être absolu. Elle est semi-allongée sur un canapé, celui-ci
poussé contre un mur, il ne le partage pas, il y a une table basse jeudi 17 avril
2014 18 heures 20 à 19 heures qu’il déplace tardivement, elle st en jean, elle accepte sa main,
ils sont nus dans l’autre pièce. Nouvelle exceptionnalité, la plante de ses
pieds plus douce qu’une paume de la main. Elle lui dit ensuite que ce fut, qu’il est,
qu’il a été exactement comme elle s’y attendait. Il ne réplique pas, ne se pose
pas la question du sens de cette évaluation : péjorative, laudative. Il
dort là, il s’éveille le premier, il la reprend, c’est aussi doux que la
veille, que les pieds, que la voix depuis leurs premières minutes quand il
n’était qu’un étranger. Il ne se demande pas ce que fait augurer une douceur
sans tendresse, ni s’il a changé d statut. Elle appelle à l’étranger, il
apprend qu’elle a deux amants, tous deux dans la même carrière qu’elle, que lui
aussi, dans son propre pays, l’un au sud mais dans le même continent, l’autre
outre-océan, et il croit pouvoir déduire qu’elle n’en a aucun sur place. Il
sera réadmis quelques minutes, il déposera des lettres, on lui fera savoir
qu’il est importun, qu’il agace, qu’il vaut mieux que… qu’il faut que…
Rencontre de même type, devant un ascenseur, à son hôtel de passage, d’attente,
il est dragué, ce qui est moins gratifié qu’un coup de foudre mais cela peut
obséder aussi, elle a une chambre à un étage inférieur, elle donne un peu, elle
arrive et vient, puis repart, il ne distingue même s’ils ont « fait »
l’amour. Elle a un regard de surprise totale mais émerveillée quand elle
l’aperçoit dans quelques parties communes, une joie qu’elle n’affiche que pour
elle-même, un ancien camarade, amant, collègue parfois les regarde passer,
sortir, rentrer avec un tristesse affichée. C’est ensuite son tour, il
n’insiste pas. Les pays d’apparente facilité sont moins prolifiques en amour
que ceux qui n’ont aucune réputation.
Aux frontières de son propre pays, en
bordure de montagnes, par climat de neige et de vrai froid, une région neuve
pour lui qu’il doit apprendre à connaître et où il doit se faire connaître,
ordre de mission ou défi qu’il s’est donné. L’objectif affiché sera manqué mais
il obtient ce qu’il n’avait encore jamais rencontré, une royauté humaine hors
mode, sans apprêt, sans éducation à la séduction. Une
sympathie, un soiré de cinéma, deux vallées plus bas avant que l’hiver
n’arrive, un lit dans une pièce unique d’habitation, pauvre et sans décor que
leur silence, un lit contre un mur, on n’en fait pas le tour. Lle lui demande
ensuite :vous avez bien joui. Les aisselles ne sont pas rasées, la
toilette est avouée au savon de Marseille, elle est d’une blancheur beige de
peau, elle est simple, elle l’accueille chez elle car là où ils se sont plus,
elle est employée et ne peut… même si lui y a
une chambre, mais à la
nuitée. Elle disparaîtra, ira sous la même enseigne ailleurs
et lui fera part de ce qu’elle a quelqu’un. Memento des vivants. Un autre reine
de la même petite ville, signalement, une porte baroque, une chapelle gothique
servant de halle d’exposition, une église à énormes piliers pas haut, sections
carrées, vitraux d’un des plus grands artistes contemporains en la matière. Merveille
de l’humanité quand elle n’est qu’elle-même. L’amour fait voyager surtout quand
il ne fonde pas. L’autre reine, quand ils manquent son avion après qu’il l’ai
accueillie pour un dépaysement total en géographie, a ce naturel : j’ai
fait tout manquer, parce que leur position qui ne lui était pas habituelle, elle
l’a défaite sans qu’ils aient achevé leur itinéraire. vendredi 18
avril 2014 à l’UCK . 17 heures 55 à 18 heures 15 Elle
préférait n’être pas photographiée nue, elle a voulu venir là où il l’invitait
puis se rétractait, faute de temps entre quatre maîtresses déjà sur orbite,
accumulation de vie quand aucune rupture n’est son fait car ce n’est pas son
art et qu’il est toujours perplexe quand l’irréversible est possible. Sera à sa
charge. dimanche 20 avril 2014 18
heures 30
Les disparitions se sont faites ainsi,
chacune anecdotiquement différente. Les anodines, les perpétuelles. Plus de
tendresse, d’amitié, de prière pour le bonheur de celle qui… celle que… quand
le temps était maître. A y réfléchir de la sorte, toutes deviennent paisibles
alors que les apparitions font toujours du tumulte, qu’elles s’assouvissent ou
se manquent à peine avait frémis le rideau. Le souvenir a la platitude d’une
image, d’une page. Rien ne vibre, alors que tout aurait pu faire une histoire,
au moins un paysage. Il y a des assauts inexplicables, un corps parfait,
potelé, une porcelaine de Nymphenbourg, le bredouillis enfantin de précisément
craindre d’être mise enceinte, un projet ? rien, des années en pointillé
de leur adolescence aux années émancipées leur ont donné une familiarité sans
tutoiement, pas de logis en propre, des hôtels qui seraient sordides, alors une
fois dans la petite forêt dont il a l’habitude et où la police l’interpelle
avec l’une pour un premier baiser, et avec l’autre, c’est-à-dire elle,
complètement nue, joie et conseils de prudence des uniformes. Plus tard,
embringué lui-même, il l’entrevoit de nuit, à un carrefour de leur capitale, en
chandail rouge, mi-errante, mi folle, la très bonne famille puis un avenir sans
doute classique après la contorsion des vingt ans d’autrefois. Un tempérament,
une gentillesse aadmirative pour l’amant possible mais qu’il refusé s’il n’est
que visiteur. Et ainsi de suite, toutes et lui poussés vers le large qui finit
par se rétrécir. Le corps n’est une dimension qu’avec un autre corps, les
rencontres sont des demandes de corps longtemps ou elles sont compagnonnages ou
elles insupportent, elles ne se disent et ne plantent de la mémoire, parfois
même de la prière votive qu’en version amoureuse. L’amitié oscille en tant de
genres. Il ne s’y arrête plus, morts enregistrées, identité changée. Le travail
ensemble a sa saison unique. Du moins, est-ce son expérience, des dialogues de plus en plus brefs,
suscités davantage par le sans-gêne ni pudeur de l’âge révolu que par les
arguments d’antan. Parmi ce qui se présente, le regard n’a plus les mêmes façon
de choisir et qui sait s’il est invité à avancer ou s’il y va de lui-même. Il
est devenu explicitement curieux d’autrui maintenant que le sexe se tait, que
les jeunes filles sont devenues des enfants, que les femmes sont mariées, que
la sienne est son seul défi, la suite de tout, un suspense qu’il n’a jamais
vécu en liaisons longus ou courtes de durée, flambantes ou refusées.
Disparitions par un mot. Elle l’appelle
au téléphone, depuis quelques semaines, il compte à rebours, une intervention
chirurgicale, vitale. Il est en retard, justement il doit déposer de sa
semence, c’est la dernière fois, la troisième. Le répondeur gardera ce qu’elle lui
dit, comment a-t-il su que c’est elle. Il y a eu quelques lettres après des
années de silence d’elle, et pour lui d’attente, de chagrin, parfois de
déséquilibre total. De cœur, il vit plusieurs vies, le passé récent et qu’elle
a clos, un autre présent qu’il ne sait qualifier, qui l’enveloppe, le chérit,
le garde en une vie du coup attaquée en biologie, il est en pleine confusion, a
hésité sur le mode d’intervention, voulant que soit préservé sa virilité. La
postérité, la médecine lui a donne les moyens. Quand il rentre de ce moment
aseptisé mais sordide, quelques images, des reproductions de Modigliani,
l’improvisation de la dédicataire mentale de ce qu’il prélève de lui-même, il
interroge la mémoire téléphonique. Un orage a fait sauter l’installation, le
texte en a été le prix. Il ne saura jamais ce qu’elle lui disait. Une
conversation brève, très décalées, elle l’assure que ce qu’elle lui a
précédemment écrit, il vaut mieux qu’il n’y croit pas. Dans l’instant, il
cristallise leur séparation aussi nettement et fortement qu’avaient pris
solidité sa certitude t sa résolution. On ne peut plaider contre soi-même, et
elle le fait. Elle signe encore plus loin en l’appelant à une escente d’avion,
non loin mais s’annonce sous un diminutif qu’il ne lui a jamais donnée et
qu’elle ne lui a jamais recommandée. D’autres disparitions n’ont pas même le
caractère d’une ponctuation pour finir, avec clarté ou décision, même
artificielles, une rivalité pas supportée et le bagage se fait, on n’entend pas
même la porte : ouverte ? fermée ? L’adresse n’est plus vivante.
Des mots encore, elle qui allait pour l’un et repartait avec un inconnu, ou
l’invitait à leur étreinte habituelle mais avec un tiers, l‘oreille vive et
triste dans l’obscurité à eux niveaux, avertit la fille qu’elle a eue
finalement avec un autre ont elle lui a d’ailleurs dit qu’il pourrait – lui –
éventuellement le remplacer tant elle est sûre d’être demeurée en lui… fais
attention, c’est un dragueur. La fille est sans caractère, sa mère n’est plus
la jeune fille d’autrefois, pas du tout parce qu’elle a trente ans de plus qu’à
leur première nuit où elle se cambrait au contre-jour d’une pleine lune et
murmurait l’acquiescement à la précision d’une main qu’il avait été seul, une heure avant, à trouver
vieille… mais parce qu’elle n’est plus amicale. L’amour s’il ne devient pas
amitié et estime, peut garder du feu, il ne s’alimente plus. La plus aimée,
désirée, la plus coûtumière quand la lassitude d’une demande ou d’un
perspective de mariage dont il n’était toujours pas capable, avait tout lassé,
revint sur la rupture qu’elle décidait, dans la pensée que leur revoir serait
orgiaque. Il fut banal, ce qui est plus triste qu’une impuissance commençant de
se déclarer. Le souvenir a beaucoup de balances, mais la mémoire choisit. Il
choisirait et sa surprise d’avoir pu s’y résoudre, continue de constituer tout
ce qu’il vit à présent.dimanche 20 avril 2014 19 heures à 19 heures 46
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